L'AUTOMÉDICATION est dans l'air du temps. Depuis longtemps, l'industrie pharmaceutique fait remarquer que la France est à la traîne en la matière par rapport aux autres pays développés. En juin 2006, le LIR (Laboratoires internationaux de recherche, une association qui regroupe quinze filiales françaises de laboratoires internationaux) militait pour un développement de l'automédication, source, selon elle, d'économies pour l'assurance-maladie. L'association préconisait même que des médicaments soient placés en amont du comptoir du pharmacien, et l'extension du champ des médicaments accessibles. Au début de l'année 2007, Alain Coulomb, ancien directeur de la HAS (Haute Autorité de santé), remettait au ministre de la Santé un rapport sur le même thème. Alain Coulomb, dans ce texte, préconise un développement contrôlé de l'automédication avec un certain nombre de mesures phares :
– limiter au maximum la présence dans la même classe thérapeutique de médicaments remboursés et non remboursés ;
– rendre le packaging des médicaments délivrés sans ordonnance facilement identifiable ;
– mise à disposition en automédication de molécules innovantes, à l'instar par exemple des pays anglo-saxons qui ont mis les statines en vente libre ;
– création de fiches d'information et de référentiels de prise en charge de certains troubles ou pathologies à destination des patients, en axant autant que possible la communication sur le symptôme plus que sur le médicament ;
– expérimentation dans certaines officines d'un espace de vente en accès direct au médicament. Un peu comme ce qui se passe aux Etats-Unis où existent des supermarchés du médicament en libre-service.
Partisans et opposants.
C'est dans ce contexte que se tient donc, demain, le colloque organisé par la Mutualité française (1). Sur le thème « Automédication, recul ou progrès ? », Jean-Pierre Davant, président de la Mutualité française, souhaite que ce colloque «permette notamment de dresser un constat de l'automédication en France et à l'étranger, et d'en dessiner les perspectives».
Un colloque qui tombe à pic à bien des égards. D'abord parce que l'automédication possède autant de solides partisans que de farouches opposants. Pour schématiser, on pourrait dire que les laboratoires pharmaceutiques se trouvent dans la première catégorie, souvent pour des raisons financières, tandis que les médecins se rangent plutôt dans la deuxième, au nom de l'intérêt du patient, certes, mais aussi par crainte, comme le dit le Dr Combier, président de l'Unof, «qu'on ne dépouille un peu plus chaque jour le médecin généraliste».
De plus, ce colloque se tient alors que Xavier Bertrand, destinataire du rapport d'Alain Coulomb, ne s'est pas encore prononcé sur les suites qu'il entend donner aux propositions qu'il contient. En prenant connaissance du rapport, le ministre de la Santé indiquait qu'il ferait part «de ses décisions d'ici à la fin du mois de février 2007. Il est déjà clairement établi qu'aucune décision de déremboursement n'interviendra dans ce cadre». Il demandait également à Alain Coulomb et au Pr Alain Baumelou de poursuivre leurs travaux, en concertation avec l'ensemble des acteurs et notamment les associations de patients, «afin de lui soumettre des propositions concrètes d'actions à mettre en oeuvre».
Le ministre n'a toujours pas fait part de ses décisions sur les suites qu'il entend donner aux suggestions du rapport. Il est vrai qu'occupant désormais la fonction de porte-parole de Nicolas Sarkozy, en plus de ses fonctions ministérielles, Xavier Bertrand a fort à faire. Ce colloque tombe d'autant plus au bon moment pour faire le point sur un dossier qui attendra le prochain ministre de la Santé, quel qu'il soit.
(1) Le colloque se réunit à la Maison de la Mutualité, 24, rue Saint-Victor, Paris Ve.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature