CRP et risque cardio-vasculaire
PLUSIEURS ETUDES EpidEmiologiques prospectives, parmi lesquelles l'étude multicentrique française Prime (1), ont mis en évidence une corrélation entre une CRP élevée et le risque cardio-vasculaire (RCV). Ce marqueur de l'inflammation apparaît comme un facteur prédictif indépendant des autres facteurs de RCV. L'association entre CRP et RCV trouve son explication dans le rôle que joue le processus inflammatoire dans la genèse de l'athérosclérose. On sait qu'il existe, au niveau de la lésion athéroscléreuse, des cellules inflammatoires - macrophages et lymphocytes - qui sécrètent des cytokines proinflammatoires, dont certaines, comme l'interleukine 6, stimulent l'excrétion hépatique de la CRP. D'autres cellules en dehors de l'artère sont également impliquées dans ce phénomène. C'est le cas de la cellule adipeuse, comme l'atteste la relation observée entre la concentration d'IL6 et le poids. Une étude chez des femmes ménopausées obèses a ainsi montré que l'adiposité est un prédicteur significatif de la concentration plasmatique de CRP (2).
Au décours d'un accident coronarien.
En ce qui concerne l'intérêt potentiel du dosage de la CRP dans la pratique, on distingue deux cas de figure. Chez les patients sans traitement hypolipémiant, victime d'un infarctus du myocarde, il a été régulièrement démontré qu'une augmentation de la CRP est un facteur de mauvais pronostic. La mesure de la CRP au décours d'un infarctus est donc utile pour évaluer le risque et adapter le traitement, avec un objectif plus sévère chez les malades avec CRP élevée qu'en cas de CRP normale. En revanche, en prévention primaire, l'utilité de la CRP reste débattue, car tous les traitements utilisés dans la prévention du risque, qu'il s'agisse des mesures diététiques, de la perte de poids ou des hypolipémiants, baissent la CRP. Mais leur efficacité préventive ne résulte probablement pas de cet effet, et à l'heure actuelle, aucun médicament agissant spécifiquement sur la CRP n'est disponible. De plus, il n'est pas prouvé qu'une diminution de la CRP a un bénéfice en termes de prévention. La mesure de la CRP pourrait néanmoins être intéressante dans quelques cas particuliers, à savoir les sujets à risque modéré, à la limite des indications du traitement hypolipémiant. Chez ces patients, une CRP inférieure à 2 mg/l pourrait orienter vers l'abstention thérapeutique avec une simple surveillance, alors que des chiffres excédant 3 mg/l plaident pour l'institution d'un traitement préventif.
Au moins deux dosages, réalisés à quinze jours d'intervalle, sont nécessaires, en particulier lorsque le premier résultat est élevé. Si les dosages actuels sont fiables, les méthodes utilisées ne sont pas encore standardisées. Il est donc difficile de définir des chiffres universels, et ce d'autant que certains facteurs affectent la mesure de la CRP (par exemple, le traitement hormonal substitutif de la ménopause qui constitue un artéfact). Enfin, une CRP supérieure à 10 mg/l est plutôt le signe d'une infection.
* D'après un entretien avec le Pr Gérald Luc, département d'athérosclérose, Inserm U545, institut Pasteur de Lille.
(1) Luc G., Bard J.M., Juhan-Vague I., Ferrieres J., Evans A., Amouyel P., Arveiler D., Fruchart J.C., Ducimetiere P. ; Prime Study Group. C-reactive protein, interleukin 6, and fibrinogen as predictors of coronary heart disease: the Prime study.« Arterioscler Thromb Vasc Biol » 2003 ; 23 (7) : 1255-1261.
(2) Tchernof A., Nolan A., Sites C.K., Ades P.A., Poehlman E.T. ; Weight loss reduces C-reactive protein levels in obese postmenopausal women. « Circulation » 2002 ; 105 (5) : 564-569.
CRP, monocytes et Pbmc
Deux études expérimentales sur les effets de la CRP dans l'athérogenèse ont été réalisées par l'équipe de D. Longrois (EA 3 447 lésions, réparations, remodelage cardiaque et artériel, Vandœuvre-lès-Nancy). Dans la première, les auteurs ont analysé l'expression de gènes et de protéines de monocytes humains ex vivo exposés ou non à la CRP (25 μg/ml). « Les premiers résultats, constatent-ils, montrent que la CRP induit la surexpression de gènes impliqués dans l'inflammation (IL1 et IL6), le recrutement (IL8 et MCP1) et l'adhérence (intégrine 6) du monocyte vers la cellule endothéliale, mais aussi dans la thrombogenèse (induction de PAI 2 ou répression de Timp 2) ». La seconde étude avait pour objectif d'évaluer les effets de la CRP sur les cellules mononucléaires du sang périphérique (Pbmc), ainsi que l'influence du sérum autologue sur les réponses. Les résultats de ces travaux indiquent, notamment, que la CRP augmente l'expression de l'ARN messager des cytokines pro-inflammatoires (TNF-alpha, IL1 alpha, IL1 bêta, IL6, IL8), de la chémokine MCP1, de l'inhibiteur des activateurs du plasminogène PAI 2 et de l'une des deux métalloprotéases étudiées (MMP9, mais pas MMP1). Pour l'équipe, l'expression accrue de MMP9 peut interférer avec la stabilité des plaques d'athérome. Enfin, des effets modulateurs du sérum (augmentation de la libération de TNF-alpha, accumulation d'I1 bêta et MMP 1) ont également été observés, suggérant « une interaction entre CRP et différentes composantes du sérum ».
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