M OINS de deux heures après avoir perdu partiellement son pouce dans une machine, un homme de 36 ans se présente dans un service de chirurgie plastique du Massachusetts. La plaie est immédiatement débridée et recouverte d'un lambeau pédiculé abdominal. Au 19e jour postopératoire, la possibilité de greffer une phalange, constituée d'un tissu de fabrication composite, est proposée au patient qui accepte la procédure.
L'intervention va alors non seulement libérer le pouce, recouvert de son lambeau abdominal, mais aussi prélever huit fragments de périoste dans la région distale du radius. Ce tissu, choisi par les chirurgiens car les ostéoblastes qu'il abrite sont pourvoyeurs d'os chez l'animal, est placé dans une solution saline contenant des antibiotiques et mis en culture. Après les neuf semaines d'incubation, 20 millions de cellules viables sont obtenues. Douze semaines après l'accident, le greffon cutané de la face dorsale du pouce est incisé pour recevoir l'implant constitué d'une matrice de corail naturel « ensemencée » par les ostéoblastes de la culture cellulaire. Le corail, préalablement découpé à la forme de la phalange manquante, est positionné, puis la suspension cellulaire y est injectée à l'aiguille fine. Une solution de chlorure de calcium est ensuite appliquée sur le greffon afin de fixer les cellules sur la matrice de corail. Le pouce est recouvert de son lambeau puis immobilisé dans une attelle pendant huit semaines.
Reprend son travail trois mois plus tard
Dix jours plus tard, le patient se sert de sa main avec son attelle sans aucune douleur. Il reprend son travail de paysagiste trois mois plus tard. A un an, l'évaluation fonctionnelle retrouve des degrés d'invalidité des fonctions de la main, du bras et du corps entier respectivement de 10 %, 9 % et 5 % comparativement aux 22 %, 20 % et 12 % des personnes amputées de la dernière phalange du pouce. A 28 mois, le patient a un pouce de taille et de force normales avec quelques sensations et l'articulation interphalangienne s'est encapsulée d'un tissu fibreux stable. L'imagerie montre une discrète subluxation de l'implant sans perte de volume ni fragmentation, une ébauche de vascularisation et une bonne densité minérale osseuse. Des résultats tout à fait intéressants comparativement aux allogreffes et autogreffes vouées à la résorption osseuse.
Charles Vacanti et coll., « New England Journal of Medicine », vol. 344, n° 20, 17 mai 2001.
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