Question
Que vous évoque le cliché radiographique pulmonaire de profil?
1) La présence d’un anévrisme de l’aorte thoracique ;
2) l’absence d’anomalie ;
3) l’existence d’une calcification péricardique ;
4) une miliaire tuberculeuse.
Réponse
La bonne réponse est la 3 : l’existence d’une calcification péricardique.
Le cliché radiographique pulmonaire permet de retrouver une calcification « ceinturant » le coeur.
Cet élément, du fait des antécédents de la patiente, doit en premier lieu évoquer une péricardite tuberculeuse.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, à quel type de complication s’expose-t-on?
L’évolution de cet épaississement en recréant une péricardite constrictive expose à un trouble du remplissage diastolique du coeur, l’adiastolie.
La péricardite constrictive
La péricardite constrictive est une maladie rare représentant 0,5 % des malades vus en cardiologie. Elle est secondaire à une atteinte du péricarde (inflammatoire, fibreuse ou calcifiée).
Cette « constriction » gêne l’expansion diastolique cardiaque perturbant le remplissage ventriculaire.
Une péricardite constrictive peut avoir différentes étiologies :
– la tuberculose. Elle représente la majeure partie des causes de péricardite constrictive, 4 à 5 % des péricardites aiguës et 10 % des tuberculoses pulmonaires. La constriction se développe lentement de manière subaiguë et s’associe dans un cas sur deux à un épanchement pleural ;
– les antécédents de radiothérapie ;
– les complications d’une insuffisance rénale chronique ;
– les conséquences d’une pathologie néoplasique ;
– l’hémopéricarde post-traumatique ou secondaire qui peut évoluer vers ce tableau ;
– la péricardite purulente.
Anatomopathologie
Le péricarde est fibreux, épaissi, plus ou moins calcifié. Cette pathologie touche en priorité le péricarde pariétal, mais peut aussi toucher le péricarde viscéral, voire même le myocarde.
Certaines atteintes évoluées se caractérisent par une fibrose secondaire consécutive à une atteinte des myocytes responsable d’une insuffisance cardiaque irréversible.
Clinique
Plusieurs éléments peuvent être retrouvés :
– une dyspnée croissante, des douleurs thoraciques ;
– un reflux hépato-jugulaire ;
– une ascite ;
– des oedèmes des membres inférieurs ;
– une hypotension avec parfois un pouls paradoxal ;
– à l’auscultation cardiaque, on retrouve un bruit protodiastolique dans deux tiers des cas (soit une vibrance témoignant d’une forme calcifiée, soit un bruit sourd en faveur d’une forme fibreuse).
Dans le cas d’une péricardite tuberculeuse, les éléments cliniques sont souvent latents ou insidieux, la douleur étant souvent peu marquée.
Les examens complémentaires
L’ECG peut objectiver un rythme sinusal avec des ondes P carrées ou bifides, une fibrillation auriculaire, une onde T plate ou négative dans toutes les dérivations, un microvoltage.
La radiographie thoracique permet de montrer un volume cardiaque normal ou petit, ainsi que des calcifications tout autour du coeur (de 50 à 100 % des cas).
L’échocardiographie témoigne de l’importance de l’épaississement péricardique et nous renseigne sur la cinétique valvulaire et sur le retentissement au niveau des différentes cavités. Ainsi, dans le cas de madame A., il existe une dilatation de l’oreillette gauche ; la cinétique de la valve mitrale reste normale.
L’échographie en mode bidimensionnel retrouve un décollement des feuillets péricardiques pouvant parfois gêner la visualisation des cavités cardiaques.
Le cathétérisme droit et gauche montre dans notre situation :
– une pression télédiastolique ventriculaire gauche normale ;
– des pressions droites normales au repos avec une courbe diastolique de pression ventriculaire droite qui n’évoque pas une adiastolie, à l’état basal et après remplissage volumique.
Généralement, on met en évidence, avec cet examen, une égalisation des pressions des quatre cavités avec une modification de la morphologie des courbes et une réduction du débit cardiaque.
La courbe de pression ventriculaire droite montre une dépression protodiastolique profonde (DIP). Elle est suivie d’une remontée brutale et d’un plateau horizontal dont la hauteur doit être supérieure au tiers de la pression systolique pour affirmer l’existence d’une adiastolie au niveau des cavités droites.
Cet aspect est rarement constaté du côté gauche.
Ce dernier examen est capital pour le choix thérapeutique ; l’absence d’adiastolie dans cette présentation clinique nous confortant dans l’idée d’un traitement médical qui associe un antiarythmique et un anticoagulant évitant ainsi le recours à un traitement chirurgical.
Les diagnostics différentiels
Parmi les diagnostics différentiels on doit évoquer :
– le coeur pulmonaire chronique et le rétrécissement mitral dont l’élimination se fait par l’échocardiographie ;
– la cirrhose qui s’associe à une hépatomégalie, une ascite (dans cette situation) ;
– les cardiomyopathies restrictives (amylose, hémochromatose, endocardite) fibroblastiques pouvant donner des tableaux similaires. Cependant, dans ces cas, la fibrose est limitée au myocarde.
Le traitement
Le seul traitement spécifique de la péricardite constrictive à être proposé est une intervention de décortication intéressant les deux feuillets (pariétal et viscéral) tout en respectant le péricarde au niveau des oreillettes.
Cette péricardectomie libère tous les orifices d’entrées intracardiaques comme les veines caves.
Ce traitement chirurgical permet une guérison complète dès que le myocarde a repris son expansion diastolique.
Cependant, il existe parfois des résultats incomplets, surtout chez les sujets de plus de 50 ans.
De plus, l’acte chirurgical doit être longuement discuté et concerne exclusivement les formes associant une asystolie, car il existe une mortalité opératoire de 10 %.
A côté de ce traitement, pour des formes peu évoluées, il est possible d’associer des diurétiques, un régime sans sel et du repos.
Le traitement antituberculeux n’est commencé qu’une fois ce diagnostic prouvé (recherche du BK dans l’expectoration, le liquide pleural, voire la ponction-biopsie du péricarde).
Bibliographie
1. Pathologie cardio-vasculaire : péricardites, http://www-sante.ujf-grenoble.fr.
2. A. Cohen, Cardiologie et pathologie cardio-vasculaire, Editions Estem, 1997.
3. P. Godeau, S. Herson, J.-C. Piette, Traité de médecine, Editions Flammarion, 2004.
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