PLASMODIUM falciparum, un pathogène redoutablement efficace, avec environ 500 millions de cas mondiaux et un million de décès annuels, exerce un impact important sur la forme du génome humain, dû à une haute prévalence dans les régions où la maladie est endémique et à une longue histoire de coévolution avec les humains : les mutations des gènes humains qu'il sélectionne permettent une survie dans les régions d'endémie.
Anémie hémolytique non sphérocytaire.
Ayi et coll. se sont appuyés sur une association trouvée, chez un modèle murin, entre un défaut portant sur la pyruvate kinase, enzyme glycolytique, et une protection contre l'infection. Le déficit en pyruvate kinase est l'anomalie de la voie glycolytique la plus fréquente et, avec le déficit en G6PD, la cause la plus courante d'anémie hémolytique non sphérocytaire.
Dans une population fréquentant deux hôpitaux de Toronto, les sujets présentant un déficit en pyruvate kinase ont été caractérisés sur la base de leur présentation clinique et des résultats d'un test enzymatique.
Une analyse génétique a été réalisée chez les patients. Trois sujets présentant un déficit en pyruvate kinase homozygote et deux sujets hétérozygotes ont été sélectionnés.
Les érythrocytes des sujets homozygotes ont été mis à l'épreuve, in vitro, au contact de deux isolats différents de Plasmodium falciparum, l'un étant sensible à la chloroquine et l'autre résistant.
L'invasion des cellules a été mesurée au cours de trois cycles de réplication du parasite : elle est significativement moindre chez les homozygotes que chez des sujets témoins (p < 0,001).
L'analyse montre également une accumulation de métabolites glycolytiques, mais sans que ces métabolites intermédiaires influent sur la croissance du parasite dans les érythrocytes.
La réduction d'invasion est-elle due à une anomalie d'adaptation du parasite, se sont interrogés les auteurs ? Non, répondent-ils après une recherche, cette réduction est causée par un défaut attribuable aux propriétés des érythrocytes.
Ils constatent aussi chez les cas que la clairance par phagocytose des cellules infectées par P.falciparum est significativement plus élevée que chez les témoins (p < 0,0001).
Au terme des analyses, les auteurs concluent donc à un double mécanisme, comportant une modification érythrocytaire et une accélération du débarras des érythrocytes infectés au stade d'anneau, pouvant conférer une protection contre la maladie, soit par réduction de la masse totale des parasites, soit par réduction du nombre des érythrocytes infectés.
Le déficit homozygote en pyruvate kinase est probablement une rareté, en raison de la gravité de l'anémie associée. Mais il est très probable que l'hétérozygotie, avec une perte totale ou partielle de fonction d'un allèle, n'ait qu'un effet annexe peu apparent sur la santé, tout en donnant une protection modeste mais significative contre le paludisme.
Ces observations fournissent un aperçu des mécanismes de défense naturels des hôtes, qui peuvent être utiles pour développer des traitements.
« New England Journal of Medicine », 358 ; 17, 24 avril 2008, pp. 1805-1810 ; commentaire pp. 1855-1856.
Des moustiques « double mutants » en forme
Des chercheurs du CNRS et de l'IRD (Institut de recherche pour le développement) s'intéressent aux moustiques « double mutants », porteurs de résistance aux deux classes d'insecticides les plus utilisées dans le monde. On présume habituellement que ces moustiques résistent bien aux insecticides, mais sont moins performants pour le reste : fécondité, survie, échappement à la prédation...
Vincent Corbet et Mylène Weill montrent dans « BioMed Central », que, contrairement à ce que l'on croyait jusqu'ici, les « double mutants » ne sont pas doublement handicapés. En comparant leurs taux de survie à celui des simples mutants, les premiers sont bien résistants aux deux types d'insecticides, mais restent plus en forme en leur absence. Comme les stratégies de lutte contre ces moustiques exploitent leur supposée vulnérabilité, «il est urgent de trouver d'autres solutions pour lutter contre eux», concluent les auteurs.
« BMC Evolutionnary Biology », 8 avril 2008.
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