DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA SCLÉROSE latérale amyotrophique (SLA), la plus fréquente des maladies neurodégénératives après la maladie d'Alzheimer, est caractérisée par une perte progressive des motoneurones dans le cortex, le tronc cérébral et la moelle épinière. Elle se manifeste par une faiblesse musculaire progressive, une amyotrophie et une spasticité. Le décès survient généralement par insuffisance respiratoire, après une évolution de un à cinq ans.
La superoxyde dismutase mutée.
On pense actuellement que plusieurs facteurs étiopathogéniques contribuent à la maladie. Le stress oxydatif jouerait notamment un rôle majeur. Ce concept a pour origine la découverte que des mutations d'une enzyme cytoplasmique, la SOD1 (superoxyde dismutase D1), peuvent causer une SLA. Environ 10 % des SLA sont familiales et à peu près 20 % de celles-ci résultent de mutations dominantes dans le gène de la SOD1.
Puisque les formes familiale et sporadique sont remarquablement similaires sur le plan clinique et pathologique, les mécanismes qui sous-tendent la forme familiale, qui sont éclairés par l'étude des modèles animaux fondés sur les formes mutantes de la SOD1, pourraient également opérer dans la forme sporadique de la maladie.
La SOD1 est une enzyme cytoplasmique capable d'éliminer l'anion superoxyde (O2-) en le transformant en peroxyde d'hydrogène (H2O2) et en oxygène.
En étudiant la biologie fondamentale du signal cellulaire, le Pr John Engelhardt, directeur du département d'anatomie et de biologie cellulaire à l'université d'Iowa, a découvert de façon inattendue que la SOD1 interagit avec Rac1, une protéine qui régule la production des radicaux superoxydes (O2-) par le complexe Nox2 (NADPH oxydase).
Une série d'expériences sur des cellules et chez la souris ont éclairé cette interaction.
Thermostat cassé et chaudière allumée en permanence.
«Lorsque SOD1 se fixe à Rac1, la protéine Nox2 produit des radicaux libres oxygénés (ROS), explique le Pr Engelhardt, qui a dirigé ce travail. Toutefois, dès qu'il y a excès de ROS, la SOD1 se sépare de Rac1 et le complexe Nox2 arrête de produire des ROS. En essence, SOD1 agit comme un thermostat qui détecte les ROS et signale au complexe Nox2 quand il faut arrêter de produire les ROS. En revanche, la version mutante de SOD1, qui cause la SLA, est moins sensible aux ROS et ne se désengage pas de Rac1. Avec ce thermostat cassé, la SOD1 mutante garde “la chaudière allumée”, productrice des radicaux libres oxygénés dans la cellule.»
Cela suggérait donc que l'interaction dysfonctionnelle entre SOD1 mutante et Rac1 est responsable, au moins en partie, de la surproduction des radicaux libres oxygénés toxiques dans la SLA familiale.
A la lumière de cette découverte, les scientifiques ont cherché à savoir si l'inhibition de l'activation de Nox, par l'apocynine, pouvait offrir un bénéfice thérapeutique dans la SLA.
Des souris ayant une forme familiale de SLA (souris transgéniques porteuses du gène SOD1 muté) ont été traitées par l'apocynine (dans l'eau de boisson) à partir d'un très jeune âge (2 semaines). Ce traitement allonge leur survie (espérance de vie doublée à la plus forte dose) et ralentit la progression de la maladie.
En culture, la toxicité dans les cellules gliales associée à l'expression des mutants SOD1 est également atténuée par l'apocynine.
«L'effet thérapeutique robuste de l'apocynine pour prévenir la progression de la SLA dans ce modèle suggère que l'inhibition de la production des radicaux libres oxygénés, par opposition au nettoyage de ces radicaux, pourrait être bien plus protectrice dans la SLA», notent les chercheurs.
Si le traitement apparaît bénéfique à tout stade de la maladie, l'intervention précoce entraîne le bénéfice maximal.
Harraz et coll. « Journal of Clinical Investigation », 24 janvier 2008.
Les formes sporadiques
«Si cette étude montre qu'une régulation anormale de l'oxydase NADPH (Nox) par la SOD mutante pourrait sous-tendre la pathogenèse de certaines formes familiales de la SLA (causées par des mutations SOD) , il est également possible que le stress oxydatif contribue à la majorité des formes sporadiques de SLA, souligne au “Quotidien” le Dr Paulson. Ainsi, inhiber l'oxydase NADPH (Nox) pourrait peut-être constituer une approche thérapeutique aussi bien pour les formes sporadique que familiale de la SLA.»
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