Médiation de l’érection

Une nouvelle forme de NO synthase neuronale

Publié le 14/02/2006
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LE MONOXYDE D’AZOTE (NO) est synthétisé par trois enzymes majeures codées par trois gènes distincts : la NO synthase inducible (iNOS), la NOS endothéliale (eNOS) et plusieurs variantes de la NOS neuronale (nNOS). On sait que le NO joue un rôle majeur dans l’érection : celle-ci est médiée à la fois par la nNOS et la eNOS, la première étant impliquée dans l’induction de l’érection et la seconde dans le maintien d’une érection maximale. Cela dit, les contributions relatives des différentes formes de NOS dans l’érection ne sont pas claires, notamment parce que l’érection est préservée chez les souris porteuses d’une délétion ciblée de la nNOS alpha (nNOS-/-) aussi bien que chez les souris eNOS-/-.

Pour y voir plus clair, Joseph Hurt et coll. (Etats-Unis) ont conduit une nouvelle étude portant chez des animaux nNOS-/-, eNOS-/- et doublement (d) mutants (dNOS-/-) ; ils montrent ainsi que des formes de nNOS épissées différemment médient une partie majeure de l’érection.

Enregistrement de la pression intracaverneuse.

Les chercheurs ont évalué la fonction érectile en enregistrant la pression intracaverneuse (PIC) en réponse à une stimulation électrique des nerfs caverneux à différents voltages. L’érection est maintenue chez tous les animaux transgéniques ; et, au voltage le plus élevé, il n’y a pas de différence entre les groupes. Toutefois, les animaux nNOS-/- et dNOS-/- répondent moins bien à une stimulation de faible voltage : à 1 V, les nNOS-/- et dNOS-/- n’obtiennent respectivement que 4 % et 26 % des modifications de la PIC observée chez les animaux sauvages. A l’opposé, les eNOS-/- sont hypersensibles, ayant une réponse de 150 % à 300 % de celle des animaux sauvages pour des stimulations de 1 à 4 V.

Les chercheurs se sont alors demandé si l’érection observée chez les animaux mutants pouvait refléter ou non la production résiduelle de NO. Ils ont donc testé l’influence du L-NAME (L-nitroarginine methylester), molécule qui inhibe de façon non sélective toutes les formes de NOS. Résultat : les trois formes mutantes de souris sont hypersensibles à l’inhibition de l’érection par L-NAME, les souris dNOS-/- étant dix fois plus sensibles que les sauvages, alors que les nNOS-/- et les eNOS-/- sont 5 et 2,5 fois plus sensibles.

La préservation de l’érection par stimulation électrique chez les nNOS-/- suggérait que les fibres contiennent de la NOS résiduelle. In vitro, les chercheurs ont comparé l’activité NOS totale dans des tissus provenant de souris sauvages et de souris transgéniques. L’activité NOS est réduite de 30 à 40 % dans les tissus eNOS-/- et de plus de 90 % dans les nNOS-/- et dNOS-/-.

De la nNOS bêta dans le ganglion pelvien.

Etant donné que l’iNOS n’a jamais été détectée dans les tissus chez les rats et les souris sauvages, les chercheurs se sont demandé si des formes de nNOS épissées différemment pouvaient maintenir l’activité érectile. De la nNOS bêta active a été décrite dans certaines régions du cerveau. Ils montrent qu’à la fois la NOS alpha et la NOS bêta sont présentes dans le corps cellulaire des ganglions pelviens dont dépend l’innervation caverneuse. Ils montrent ensuite que le variant bêta de la nNOS provoque une érection normale malgré une diminution des caractéristiques de la réponse au stimulus et une multiplication par cinq de la sensibilité au L-NAME, inhibiteur de NOS. La nNOS bêta résiduelle génère seulement 10 % des taux normaux de NO in vitro, mais il n’y a pas de diminution du marquage de la citrulline et de la NADPH diaphorase ; en fait, in vivo, l’activité NOS dans le ganglion pelvien est comparable à celui des animaux sauvages. «Ainsi, des formes différemment épissées de nNOS sont des médiateurs majeurs de l’érection et pourraient être des cibles pour des interventions thérapeutiques», concluent les auteurs.

« Proc Natl Acad Sci USA », édition en ligne avancée.

> Dr EMMANUEL DE VIEL

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7899