UN CHAMPIGNON qui pousse dans les forêts de pins du nord de l'Europe, Pseudoplectania nigrella, pourrait devenir l'un de nos meilleurs alliés dans la lutte contre les maladies infectieuses. Une équipe de recherche danoise vient en effet de découvrir que ce champignon synthétise un peptide antimicrobien capable de détruire efficacement la plupart des souches de Steptococcus pneumoniae, y compris celles connues pour résister aux antibiotiques. Ce peptide a été baptisé « plectasine ».
La plectasine est un peptide de petite taille, très riche en cystéine. Elle possède des structures primaires, secondaires et tertiaires très semblables à celles des peptides antimicrobiens de la famille des défensines. Des peptides apparentés avaient déjà été isolés à partir d'organismes aussi divers que des araignées, des scorpions, des libellules ou des moules. Mais c'est la première fois que l'on en découvre un dans un champignon.
Lors d'expériences préliminaires conduites in vitro, Mygind et coll. ont démontré que la plectasine est capable de tuer plusieurs espèces de bactérie à Gram positif, notamment plus de 90 sérotypes de S. pneumonia dont certains sont résistant aux antibiotiques courants. La cinétique de l'activité antimicrobienne du peptide s'est révélée identique à celle de la vancomycine et de la pénicilline. Par ailleurs, les chercheurs ont pu démontrer que le peptide n'est pas toxique pour les cellules de mammifères en culture.
Mygind et coll. ont poursuivi la caractérisation de l'activité du peptide in vivo, chez la souris. Il ont pu démontré que l'injection de plectasine par voie intraveineuse est bien tolérée par les animaux jusqu'à la dose de 125 mg/kg.
Deux modèles d'infections à pneumocoques.
L'activité anti-infectieuse de la molécule a été évaluée dans deux modèles d'infections systémiques à pneumocoques : la péritonite (induite par injection intrapéritonéale de S. pneumoniae) et la pneumonie (administration intranasale de S. pneumoniae). L'administration de plectasine (10 mg/kg) s'est révélée aussi efficace que celle de vancomycine dans le modèle de la péritonite et comparable à celle de pénicilline dans le cas de la pneumonie.
Ce travail suggère donc que la plectasine possède une activité antimicrobienne qui rivalise avec celle des antibiotiques conventionnels. De plus, les données disponibles relatives aux peptides antimicrobiens de la famille des défensines indiquent que ces molécules conduisent plus rarement à l'émergence de résistance que les antibiotiques conventionnels. C'est pourquoi leur utilisation en thérapie est si séduisante. Cependant, jusqu'ici, toutes les défensines identifiées étaient trop peu efficaces et/ou trop mal tolérées et/ou encore trop coûteuses à produire. D'après les résultats préliminaires de Mygind et coll., la plectasine semble ne poser aucun de ces problèmes. Elle pourrait donc rapidement rejoindre l'arsenal des molécules utilisées dans les traitements des maladies infectieuses humaines.
Mygind et coll., « Nature » du 13 octobre 2005, pp. 975-980.
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