« LA VOIE de l'inhibition des tyrosines kinases dans le traitement de certains types de cancer semble tout à fait prometteuse. Leur utilisation chez les sujets atteints de leucémie myéloïde chronique a confirmé l'intérêt de ce type d'approche », explique en préambule le Pr Paris Kosmidis (Athènes). Partant du fait qu'entre 40 et 80 % des cancers du poumon non à petites cellules surexpriment l'Egfr (Epidermal Growth Factor), des chercheurs ont tenté de mettre au point un inhibiteur de la tyrosine kinase, impliquée dans la dimérisation ou l'hétérodimérisation de l'Egfr.
C'est de cette façon qu'a été découvert le gefitinib, qui interagit spécifiquement avec le facteur de croissance épidermique. In vitro, cette molécule s'est révélée active sur des cultures de cellules tumorales et cet effet n'était pas corrélé avec le niveau d'expression de l'Egfr ou de récepteurs de la famille Erb (tels que HER2/neu, par exemple). Le gefitinib a été testé chez des sujets souffrant de cancer du poumon non à petites cellules. Si 90 % des sujets se révèlent insensibles à ce traitement, 10 % présentent une réponse clinique très significative dès les premières utilisations. « Mais les mécanismes moléculaires sous-tendant cette sensibilité à l'inhibiteur de la tyrosine kinase n'étaient jusqu'à présent pas connus », analyse le Pr Jean-François Morere (hôpital Avicenne, Bobigny).
Mutations somatiques sur le gène de l'Egfr.
L'équipe du Dr Thomas Lynch (Harvard) a procédé à une analyse des gènes de 275 patients atteints de cancer du poumon non à petites cellules réfractaires aux traitements habituels et de 25 sujets appartenant à ce groupe et répondeurs au gefitinib. Ils ont ainsi découvert que, chez 85 % des sujets répondeurs à l'inhibiteur de tyrosine kinase, il existait des mutations somatiques sur le gène de l'Egfr : il s'agissait de délétions ou de substitutions d'acides aminés à proximité de la poche de liaison ATP sur le domaine de la tyrosine kinase. Des mutations similaires ont été retrouvées chez 8 % environ des sujets résistant aux traitements chimiothérapiques habituels et chez aucun des malades non répondeurs au gefitinib. Ces mutations se sont révélées hétérozygotes, et des mutations identiques ont été observées chez certains patients suggérant un gain de fonction additif spécifique. In vitro, les mutants Egfr étaient dotés d'une activité tyrosine kinase majorée en réponse à une mise en contact avec de l'Egfr, ce qui pourrait expliquer leur sensibilité au gefitinib.
Pour le Pr Morere, « ce travail pourrait conduire à la mise au point d'un test de sensibilité au gefitinib qui pourrait permettre de détecter de façon précise les sujets les plus à même de bénéficier de l'apport thérapeutique de cet inhibiteur de la tyrosine kinase ».
« Living with Lung Cancer », un symposium organisé par les Laboratoires AstraZeneca,
« New England Journal of Medicine », vol. 350, pp. 2129-2139.
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