DE NOTRE CORRESPONDANTE
LES MUTATIONS dites non-sens sont des mutations qui introduisent un codon stop prématuré dans l'ARN messager (ARNm). Le phénomène entraîne l'arrêt prématuré de la traduction de l'ARNm en protéine et aboutit à la synthèse d'une protéine plus courte et non fonctionnelle.
On trouve ces mutations non-sens dans beaucoup de maladies génétiques. Elles sont responsables de 10 % des cas de mucoviscidose, de 15 % des cas de myopathie de Duchenne et de 70 % des cas de syndrome de Hurler.
Des antibiotiques de la famille des aminoglycosides, comme la gentamicine (« le Quotidien » du 2 avril 2007), sont capables, à des concentrations élevées, de favoriser la «translecture» des codons-stop prématurés (on parle volontiers de «lecture forcée»), et de restaurer la production d'une protéine entière et fonctionnelle.
On sait, par des études sur la mucoviscidose, qu'une réexpression, même minime, de la protéine fonctionnelle peut réduire considérablement la sévérité ou éliminer les principales manifestations de la maladie en élevant son taux à seulement 50 % du taux normal.
Des essais de traitement par la gentamicine ont donc été conduits chez des patients atteints de mucoviscidose ou de myopathie de Duchenne liées à des mutations non-sens. Ces essais ont apporté la preuve du concept, mais l'effet modéré de la gentamicine, sa toxicité rénale et auditive, et son administration intramusculaire limitent l'usage clinique de cette approche.
Un criblage de petites molécules.
Une molécule au mode d'action comparable, le PTC124, a été identifiée au cours d'un criblage de petites molécules, par la compagnie biopharmaceutique PTC Therapeutics (South Plainfield, New Jersey). Ce nouveau composé ne présente aucune ressemblance structurelle avec la gentamicine ou d'autres médicaments.
Une étude préclinique, publiée en ligne par la revue scientifique « Nature », a établi l'efficacité du PTC124 dans un modèle animal de la myopathie de Duchenne.
Welch et coll. montrent que le PTC124 favorise la production de la dystrophine dans les cellules musculaires striées provenant de patients myopathes, ainsi que dans les cellules de souris mdx, qui portent des allèles non-sens de la dystrophine.
Restaure partiellement la fonction du muscle strié.
De plus, en 2 à 8 semaines de traitement, le PTC124, bien toléré, restaure partiellement la fonction du muscle strié chez les souris mdx. Le PTC124 favorise la translecture du codon-stop prématuré sans affecter le codon-stop normal.
«Etant donné la sélectivité du PTC124 pour les codons-stop prématurés, son profil d'activité bien caractérisé, sa biodisponibilité orale et ses propriétés pharmacologiques, ce médicament pourrait avoir un vaste potentiel clinique pour le traitement d'un large groupe de maladies génétiques ayant peu ou pas d'options thérapeutiques», conclut l'équipe, qui comprend des chercheurs de PTC Therapeutics, des universités de Pennsylvanie et du Massachusetts.
Des études précliniques ont également montré que le PTC124 restaure la production de la protéine CFTR dans un modèle animal de mucoviscidose liée à des mutations non-sens.
Des études cliniques de phase 2 ont déjà commencé pour évaluer le PTC124 chez des patients atteints de mucoviscidose ou de myopathie de Duchenne. Un essai de phase 1 avait démontré la bonne tolérance. «En plus de ces essais, nous évaluons le PTC124 dans d'autres maladies génétiques», ajoute le Dr Peltz.
Welch et coll.,« Nature », 22 avril 2007, DOI : 10.1038/nature05756.
Le PTC124 a obtenu le statut de médicament orphelin par la FDA (Food and Drug Administration) dans le traitement de la myopathie de Duchenne et de la mucoviscidose par mutations non-sens.
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