DANS LE CADRE de l’enquête Escapad 2004 (enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel à la préparation à la défense), conduite par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (Ofdt), plus de 1 700 jeunes Parisiens de 17 ans ont répondu à un questionnaire sur leur mode de vie, leur santé et leurs usages des produits psychoactifs. Ce qui a permis d’établir une cartographie des usagers à comparer avec la cartographie socio-économique.
Dans le quart nord-est de la capitale (les 3e, 4e, 10e, 11e, 18e, 19e et 20e arrondissements), les jeunes consomment moins de tabac, d’alcool, de médicaments psychotropes et de produits illicites que ceux des quartiers plus nantis, et notamment le quart sud-ouest (6e, 7e, 14e, 15e et 16e). Si un jeune sur quatre fume quotidiennement dans le Paris populaire, auquel s’ajoutent les 12e, 13 et 5e formant le quart sud-est, ils sont 33 % dans le sud-ouest et 37 % au nord-ouest (1er, 2e, 8e, 9e, 17e).
Même différence pour les épisodes alcooliques : dans le nord-est, 7 % en ont connu une dizaine au cours des trente derniers jours, contre 15 % dans le nord-ouest et 11 % dans le sud-est. Des écarts sensiblement identiques sont observés pour les ivresses répétées trois fois dans l’année : 10 % dans le nord-est, 15 % dans le sud-est, 20 % dans le sud-ouest et 21 % dans le nord-ouest.
L’usage, pendant le mois, de médicaments psychotropes et de cannabis varie de 9 % (psychotropes) et de 26 % (cannabis) dans le nord-est à 15 et 33 % dans le sud-ouest, en passant par 10 et 30 % dans le sud-est et 11 et 32 % dans le nord-ouest. Seule l’héroïne déroge à la règle : 2 % l’ont expérimentée dans les quartiers populaires, alors qu’ailleurs sa pénétration est quasi nulle. En revanche, le sud-ouest arrive en tête pour les expérimentateurs de cocaïne (4 %, contre une moyenne parisienne de 2 %) et de poppers* (11 % versus 7 %). «Les jeunes du quart nord-est disposent de moins de moyens, peut-être, pour acheter des produits que les autres Parisiens du même âge, commente pour ”le Quotidien” Stéphane Legleye, chargé d’étude à l’Ofdt. Ils sortent moins dans les bars et vont rarement chez des amis. Et puis, certaines personnes à revenus modestes ne souhaitent pas qu’on leur ajoute le stigmate de l’usager de drogue.» Quel que soit leur milieu, les Parisiens ne sont pas plus consommateurs de substances psychoactives que les autres Français ou les Franciliens.
A l’ouest, on se soigne plus.
Les résultats de l’enquête Escapad, la première du genre dans la capitale, contredisent l’image répandue de quartiers populaires consommateurs de drogues et de quartiers riches plus modérés. Il n’en est pas de même pour les aspects sociaux et les comportements de santé. Globalement, les habitants de l’est et surtout du nord-est sont plus souvent en difficulté scolaire (filière professionnelle, apprentissage ou redoublement) et exposés à la violence (bagarres, agressions).
Tandis que les Parisiens du sud-ouest ont un meilleur état de santé. Quatre pour cent sont en surpoids au lieu de 9 % dans le nord-est, où 13 % des 17 ans sont en équilibre pondéral versus 19 % chez les nantis. L’ouest, enfin, est associé à moins de problèmes dentaires et à une fréquentation plus élevée (18 % contre 13 %) de spécialistes en santé mentale en cas de besoin (symptômes anxiodépressifs).
* Les poppers, produits à inhaler vendus dans les sex-shops – classés en conséquence comme produits illicites –, provoquent une brève hilarité et une vasodilatation.
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