L'IRM (imagerie morphologique par étude du spin des protons des molécules d'eau) est en fait dérivée de la spectrométrie par résonance magnétique (SRM), qui peut être effectuée dans le cerveau sur trois métabolites : la N-acétylaspartate (marqueur de la viabilité neuronale), la choline (marqueur de l'intégrité des membranes et notamment axonales) et la créatine totale (marqueur du métabolisme énergétique et de la cellularité). Il s'agit de métabolites naturellement présents et l'image métabolique peut être obtenue dans un volume ou une tranche du cerveau.
Dans l'unité du centre de résonance magnétique biologique et médicale de Marseille (CRMBM et CHU de la Timone), dirigée par Patrick Cozzone, on travaille depuis une vingtaine d'années sur les applications de cette imagerie.
Discriminer les types
Les chercheurs ont publié dans le « Journal of Neurosurgery »* l'apport de la SRM dans le diagnostic des gliomes, qui sont les tumeurs cérébrales les plus fréquentes et dont il importe de discriminer les types, étant donné la variabilité des traitements et des pronostics. Le travail de l'équipe du CNRS, en collaboration avec l'unité de neuro-oncologie (Dr Chinot) et le service de neuropathologie (Pr Figarella-Branger) de la Timone, montre que la gliomatose cérébrale et les gliomes de bas grade ont des profils métaboliques spécifiques. Alors que la gliomatose cérébrale est une tumeur primitive de très mauvais pronostic (avec une survie moyenne des patients inférieure à un an), les gliomes de bas grade sont de bien meilleur pronostic (la survie moyenne peut dépasser dix ans et certains, pris à temps, sont associés à une espérance de vie normale).
L'IRM révèle dans les deux cas une anomalie, mais ne permet pas de les différencier. L'histopathologie n'est pas non plus suffisamment informative à cet égard.
Les chercheurs ont étudié 9 patients atteints de gliomatose cérébrale et les ont comparés à 9 autres atteints de gliome de bas grade et à 25 volontaires sains. Ils ont montré que le profil métabolique de la gliomatose est radicalement différent de celui des gliomes de bas grade. Une analyse multivariée permet de séparer clairement ces deux populations : comparativement aux tissus normaux, la gliomatose cérébrale est associée à une diminution du rapport choline/créatine (augmentation modérée de la choline et élévation plus importante de la créatine), alors que le gliome de bas grade révèle une augmentation de ce rapport (concentration élevée de choline et concentration normale ou diminuée de la créatine). Les profils métaboliques particuliers par rapport aux autres types de tumeurs cérébrales ont été confirmés par l'analyse d'une base de données d'une centaine de tumeurs cérébrales explorées par SRM au CRMBM. Un codage coloré de la créatine et de la choline permet une visualisation claire.
Cette contribution est décisive pour le diagnostic différentiel. Elle pourrait aussi donner des informations sur des anomalies métaboliques spécifiques aux tumeurs, conduisant éventuellement à des voies thérapeutiques, souligne Patrick Cozzone.
De nombreux centres travaillent sur la spectrométrie. Le CRMBM, qui est le centre de référence en Europe, valide des applications dans des domaines qui vont en s'élargissant : diagnostic de nature et de gravité des tumeurs cérébrales, diagnostic de gravité des AVC (important pour la décision de thrombolyse), diagnostic précoce de la SEP, repérage du foyer épileptogène dans les épilepsies pharmacorésistantes, diagnostics des encéphalopathies (métaboliques, secondaires à une infection, hypoxiques...).
* Vol. 98, février 2003.
Un examen accessible
L'imagerie métabolique par SRM peut être réalisée avec tout appareil d'IRM à 1,5 Tesla, ce qui est le cas des appareils présents dans les hôpitaux publics et les grandes cliniques, auxquels il suffit de rajouter un logiciel. On peut effectuer la SRM à la suite d'une exploration par IRM, sans préparation du malade ni intervention d'un quelconque produit radioactif. La SRM est cotée comme l'IRM.
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