Myosite à éosinophiles

Une maladie qui serait à l’origine de la calpaïnopathie

Publié le 23/04/2006
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LES TRAVAUX d’une équipe de chercheurs et de cliniciens français et espagnols révèlent l’existence d’une association entre la mutation du gène de l’enzyme protéolytique calpaïne-3 ( CAPN3) et certaines formes d’une maladie inflammatoire rare, la myosite à éosinophiles.

La mutation de CAPN3 étant par ailleurs responsable de la dystrophie musculaire des ceintures de type 2A (ou calpaïnopathie), cette découverte suggère que les myosites à éosinophiles d’origine génétique pourraient correspondre à une phase précoce des calpaïnopathies. Cette hypothèse reste à tester, mais si elle se vérifie, l’utilisation de traitements anti-inflammatoires pourrait être proposée aux malades en phase précoce pour retarder l’évolution de la myopathie.

Les myosites à éosinophiles sont généralement d’origine infectieuse. Elles sont fréquemment observées au cours de certaines affections parasitaires, en particulier celles dues à Trichinella spp, à Taenia solium et les sarcosporidioses. Cependant, chez certains patients, l’étiologie de la myosite ne peut être expliquée par un phénomène infectieux ou allergique. En discutant d’un de ces cas atypiques, l’équipe de Nicolas Lévy (unité Inserm 491, hôpital de la Timone, Marseille) et celle de J. Andoni Urtizberea (AP-HP, hôpital marin d’Hendaye) ont commencé à imaginer l’existence d’un lien entre la myosite à éosinophiles idiopathique et la calpaïnopathie.

Pour vérifier cette théorie, les chercheurs ont examiné la séquence du gène CAPN3 chez six patients non apparentés, âgés de 3 à 11 ans. Des mutations ont été mises en évidence dans les six cas.

Ainsi, une déficience de CAPN3 pourrait être la cause d’au moins une partie des myosites à éosinophiles d’origine inexpliquée. Cette forme génétique héréditaire de la maladie serait transmise selon le mode autosomal récessif. L’étude de Krahn et coll. (portant sur seulement six cas) suggère en outre qu’elle s’exprime dans la première décennie de la vie des patients et qu’elle est associée à une élévation du niveau sérique de la créatine phosphokinase et à une hyperéosinophilie périphérique inconstante.

Le gène CAPN3.

L’ensemble des données obtenues au cours de cette étude conforte assez bien l’hypothèse selon laquelle cette forme particulière de myosites à éosinophiles serait en réalité la phase précoce d’une dystrophie musculaire des ceintures de type 2A. Pour s’en assurer, les chercheurs proposent, tout d’abord, de rechercher la présence d’éosinophiles dans les biopsie musculaires des patients souffrant de calpaïnopathie et, ensuite, de suivre l’évolution des patients atteints d’une forme génétique de myosites à éosinophiles afin de savoir si leur maladie évolue vers une myopathie. Si tel est bien le cas, il pourrait être possible de ralentir la progression de la maladie inflammatoire vers la paralysie grâce à l’administration d’anti-inflammatoires dès le début de la myosite.

Ces travaux, notamment financés par l’AFM grâce aux dons du Téléthon, montrent comment la recherche des causes génétiques d’une maladie peut avoir des conséquences directes sur la prise en charge des malades.

M. Krahn et coll., « Annals of Neurology », publication en ligne du 10 avril 2006.

> ELODIE BIET

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7946