CHARLEVILLE-MÉZIÈRES, dont Rimbaud a dit que c'était « la plus idiote de toutes les villes de province », n'est heureusement pas rancunière. Elle n'a pas ménagé ses efforts pour célébrer comme il se doit le mythe qu'est devenu l'homme aux semelles de vent, même si ses œuvres complètes ne tiennent qu'en un seul volume, pas spécialement épais.
C'est ainsi que le chef-lieu des Ardennes, qui a organisé tout au long de cette année Rimbaud une série de manifestations, vient d'installer sur la place Ducale, au centre de la ville, 800 bustes colorés du poète, une création de l'artiste allemand Ottmar Horl, qui, posés sur des poteaux métalliques de hauteur différentes, donnent l'impression d'une « vague » rimbaldienne ; à la fin de l'exposition, le 24, ils seront mis en vente à partir de 250 euros. Par ailleurs, pendant cette semaine, une péniche accostée devant le musée Rimbaud, joue le rôle de bateau ivre. Et un site internet Rimbaud-arthur.fr sera mis en ligne le jour anniversaire.
L'hommage ne s'arrête pas là : dès 2005, un parcours intitulé « les trous dans l'espace » traversera la ville de part en part ; neuf écrans vidéo diffusant en direct des images des différents lieux où a voyagé le poète (Paris, Chypre, Bruxelles...), joueront le rôle de plaques commémoratives d'un nouveau genre, tandis que des écrans similaires, installés dans ces différentes villes, transmettront des images de Charleville. Véritable prouesse technologique, ce projet tissera ainsi un fil magique entre la ville qu'Arthur Rimbaud voulait fuir, et le reste du monde, qu'il voulait tant découvrir.
Une errance rimbaldienne.
Cela nous ramène à la maison familiale située sur un des quais de la Meuse, où Madame Rimbaud emménagea avec ses quatre enfants alors qu'Arthur avait 15 ans et d'où, jusqu'à ses 21 ans, il ne cessa de s'évader mais en y revenant toujours. La Ville l'a rachetée étage par étage entre 1998 et 2002 et a choisi de raconter, dans chacune des neuf pièces, un voyage que le poète a réalisé ou simplement fantasmé. Aucun meuble dans cet appartement, la maison n'est habitée que par l'image et le son. Neuf artistes - compositeurs, écrivains, plasticiens ou vidéastes - ont ainsi constitué une errance rimbaldienne où l'on navigue librement, passant d'un voyage à un autre, sans ordre chronologique ni notices biographiques.
Au niveau éditorial, signalons la nouvelle édition de ses œuvres complètes et de sa correspondance due à Robert Kopp dans la collection Bouquins chez Robert Laffont, un très vivant Album Rimbaud et l'œuvre intégrale manuscrite chez Textuel, qui publie également, sous la direction de Claude Jeancolas, une anthologie sur le poète ; des dizaines d'écrivains ou d'artistes, de Proust à Borges, en passant par Gainsbourg ou Cartier-Bresson, y racontent l'émotion éprouvée en lisant Rimbaud, s'interrogent sur son abandon de l'écriture et soulignent son influence sur leur propre création.
Et rappelons bien sûr le dernier roman de Philippe Besson paru chez Julliard, « les Jours fragiles ». L'auteur y livre le journal apocryphe de la jeune sœur du poète, Isabelle, depuis le 22 mai 1891 quand elle apprend l'hospitalisation de son frère à Marseille, où il a été amputé d'une jambe après dix années d'aventures africaines, jusqu'à sa mort le 10 novembre, peu après ses trente-sept ans. Pendant quatre mois, d'abord à la ferme familiale ardennaise puis à Marseille où Rimbaud, qui s'était à nouveau « enfui » pour retourner en Afrique, a dû être hospitalisé à nouveau, elle s'est occupée inlassablement de lui.
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