UN TRAITEMENT antitumoral inédit, se fondant sur le transfert de lymphocytes T CD4+ autologues, vient d'être testé avec succès par une équipe du centre de recherche sur le cancer Fred Hutchinson (Seattle). Certes, un seul patient en a pour l'instant bénéficié. Mais, alors qu'il était en échec thérapeutique complet, cet homme atteint d'un mélanome récidivant métastasé est en rémission depuis deux ans.
Le principe de l'immunothérapie mise en oeuvre par Cassian Yee et son équipe consiste à délivrer au patient des cellules T CD4+ productrices de cytokines. Ces cellules vont stimuler les cellules T cytotoxiques antitumorales présentes dans l'organisme. L'idée est aussi d'utiliser les propres lymphocytes des patients, isolés, sélectionnés et multipliés in vitro. Ce concept séduisant n'avait jamais pu être testé jusqu'ici pour des raisons techniques relatives à la culture des cellules T CD4+.
Métastasé au poumon et à l'aile iliaque gauche.
Le patient traité était âgé de 52 ans. Il présentait un mélanome récidivant métastasé au poumon et à l'aile iliaque gauche, avec des ganglions inguinaux. L'administration d'interféron alpha, quatre cycles d'interleukine 2 et l'excision locale de la tumeur n'avaient donné aucun résultat satisfaisant.
L'équipe médicale a collecté des cellules mononucléées du sang périphérique du patient et mis en culture des lymphocytes T ainsi obtenus. La culture a été réalisée en présence de cellules présentatrices d'antigène, chargé avec le peptide NY-ESO-1, un antigène tumoral exprimé par 50 à 75 % des cellules tumorales du patient. Cette astuce a permis d'obtenir un grand nombre de lymphocytes T CD4+ spécifiquement dirigées contre les cellules tumorales. La capacité de ces cellules à produire de l'interleukine 2 et des interférons alpha en réponse à l'antigène a été vérifiée in vitro. Environ plusieurs centaines de millions de ces cellules ont été réinjectées au patient.
Dans les jours suivant la perfusion, ce dernier a présenté une lymphopénie transitoire, une fièvre peu intense (> 38,5 °C) et des douleurs musculaires. Aucun effet secondaire sévère n'a été observé.
Tumeur et métastases avaient totalement disparu.
Deux mois après le perfusion, un PET-scan et une tomodensitométrie ont permis de découvrir que la tumeur et ses métastases avaient totalement disparu. Deux ans plus tard, la maladie n'était pas réapparue.
Des analyses complémentaires ont permis de préciser les mécanismes associés à cette réussite thérapeutique. Alors que les lymphocytes T cytotoxiques CD8+ ne survivent qu'une vingtaine de jours lorsqu'on les transfère chez un malade sans administrer conjointement une dose importante de cytokines, les cellules T CD4+ restent détectables pendant au moins trois mois. Leur nombre augmente rapidement dans les jours suivant la transfusion pour atteindre jusqu'à 3 % de la totalité des cellules mononucléées.
Ces analyses ont en outre révélé un phénomène inattendu. Alors que certaines des cellules tumorales du patient n'exprimaient pas NY-ESO-1, le transfert de cellules T CD4+ ciblant cet antigène a conduit à l'élimination de l'ensemble des cellules cancéreuses. L'examen des cellules T du malade a révélé l'émergence de lymphocytes spécifiques d'autres antigènes associés aux mélanomes, en particulier des cellules répondant aux antigènes MART-1 et MAGE-3. Les cellules T CD4+ transférées seraient donc capables de stimuler la réponse antitumorale endogène dans sa globalité. Les mécanismes exacts conduisant à ce phénomène restent à élucider.
N. Hunder et coll., « N Engl J Med » du 19 juin 2008, pp. 2698-2703.
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