L ES médecins généralistes et urgentistes ont l'habitude de voir arriver en consultation des patients asthmatiques qui semblent à court de souffle, respirant par inspirations profondes et présentant un sifflement. Mais un grand nombre d'entre eux récupèrent une respiration normale en respirant simplement dans un sac en papier.
Comme l'explique le Dr Ducan Keeley (Oxfordshire) dans un éditorial, « les symptômes d'asthme sont en effet souvent associés à des manifestations respiratoires de l'anxiété accompagnées de paresthésies des extrémités et parfois de douleurs thoraciques ». Afin d'évaluer la part respective de ces deux types de manifestations, chez des asthmatiques choisis dans une population de patients dépendant d'un même médecin généraliste, une équipe de chercheurs britanniques, coordonnée par Mike Thomas (Gloucestershire), a fait parvenir à 307 asthmatiques un questionnaire d'évaluation des signes cliniques d'anxiété. Ce questionnaire, dit de Nijmegen, évalue 16 variables. Un score rapporté par les patients supérieur ou égal à 23 est le signe d'une hyperventilation (avec une sensibilité de 91 % et une spécificité de 95 %).
Des femmes majoritairement
Les réponses à 219 questionnaires ont été analysées par les investigateurs : 63 des patients ont rapporté des symptômes cliniques d'hyperventilation. Ces malades, de sexe féminin majoritairement (35 % des femmes asthmatiques contre 20 % des hommes), étaient âgés en moyenne 44,8 ans (contre 49 pour les personnes indemnes). Ces chiffres n'étaient pas influencés par la sévérité de l'asthme, selon la classification de la British Thoracic Society, et par les traitements habituellement prescrits.
Pour les auteurs, « ce questionnaire, qui ne nécessite que quelques minutes pour être rempli et qui peut donc être employé en pratique quotidienne, devrait permettre d'évaluer les risques d'apparition de symptômes d'hyperventilation. Les médecins, sur cette base, peuvent donc mettre en place des stratégies comportementales afin de réduire l'incidence de ce type de dysfontion respiratoire. » On sait en effet que des stratégies comportementales - informations scientifiques, réassurance, réattribution des symptômes, exercices de relaxation, entraînement à des techniques respiratoires fondées sur l'utilisation du diaphragme - peuvent améliorer les signes d'hyperventilation.
Des items non validés
Dans un éditorial, le Dr Keeley rappelle que « les items du questionnaire de Nijmegen n'ont pas été validés dans une population d'asthmatiques et qu'on ne peut donc pas estimer, en l'état, leur sensibilité et leur spécificité dans cette sous-population ». Il souligne aussi que « pour certains patients les signes d'hypocapnie font partie intégrante des manifestations cliniques de leur asthme et qu'il leur est difficile de faire la part des deux types de symptômes ». Néanmoins il précise que « l'apprentissage comportemental des techniques respiratoires peut trouver sa place chez les patients qui présentent le plus d'anxiété, mais qu'il doit être réservé à des praticiens formés à cette spécialité ». Des études évaluant l'intérêt de ce type d'approche devraient maintenant être mises en place sur des populations plus larges d'asthmatiques choisies en médecine générale.
« British Medical Journal », vol. 322, pp. 1075-1076 et 1098-1100, 5 mai 2001.
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