De notre correspondante
LA SCLÉROSE latérale amyotrophique (SLA), une maladie du motoneurone, est caractérisée par une dégénérescence relativement rapide des neurones moteurs, qui aboutit au décès par insuffisance respiratoire souvent de deux à cinq ans après le diagnostic. La majorité des cas sont sporadiques, mais de 5 à 10 % sont familiaux, dont 20 % liés à des mutations du gène SOD1 (Cu/Zn superoxyde dismutase 1).
Des souris et des rats transgéniques portant les gènes SOD1 humains mutés présentent de nombreuses manifestations de la maladie humaine et en constituent donc des modèles. Les anomalies cellulaires de la SLA ne sont pas limitées aux motoneurones. Plusieurs études suggèrent que les cellules non neurales contribuent de façon importante à la dégénérescence des motoneurones.
Ainsi, une dysfonction des astrocytes est observée dans la SLA, souvent avant les premiers signes cliniques. Des études suggèrent que les interactions astrocytes-motoneurones jouent un rôle important dans l'étiologie de l'affection.
La faisabilité et l'efficacité.
Une équipe de l'université Johns Hopkins (Baltimore), dirigée par le neurologue Nicholas Maragakis, a émis l'hypothèse que le remplacement ou l'enrichissement avec des astrocytes sains, au moyen d'une greffe de leurs précurseurs, pourrait ralentir ou stopper l'évolution de la maladie. Leur étude, publiée dans la revue « Nature Neuroscience », prouve la faisabilité et l'efficacité de cette approche sur un rat modèle de SLA (SOD1 G93A).
Les chercheurs ont greffé chez ces rongeurs, à l'âge de 3 mois, des cellules précurseurs d'astrocytes (Glial-Restricted Precursors ou GRP, dérivés de la moelle épinière en développement) dans la moelle cervicale. Au total, 900 000 cellules ont été injectées bilatéralement au niveau de C4, C5 et C6, afin de cibler les motoneurones innervant le diaphragme.
Le marquage des cellules GRP par fluorescence verte a permis de constater leur survie dans la moelle épinière malade (32 % à la fin de la maladie). Ces cellules se différencient efficacement en astrocytes et réduisent la microgliose dans la moelle épinière des rats malades. Aucun effet néfaste n'est observé et, notamment, aucune tumeur ne s'est développée.
Les résultats sont prometteurs. La greffe de cellules GRP allonge la survie des rats. Elle atténue la perte des motoneurones et ralentit le déclin des fonctions motrices des pattes et respiratoires.
L'effet neuroprotecteur, d'après l'équipe, est dû en partie à la protéine transporteur du glutamate (GLT1) apportée par les précurseurs d'astrocytes. Ce transporteur pourrait aider à éliminer les excès toxiques d'un neurotransmetteur, le glutamate, facteur potentiel de SLA.
Les neurones moteurs respiratoires.
Comme le souligne au « Quotidien » le Dr Nicholas Maragakis, «cette étude indique que les cellules non neurales, comme les astrocytes, pourraient représenter des cibles utiles pour traiter la maladie du motoneurone… Cela pourrait changer nos perspectives sur les thérapies traditionnelles et de remplacement cellulaire dans cette maladie… Ces résultats suggèrent que les astrocytes jouent effectivement un rôle dans la progression de la SLA chez les modèles animaux. Ils plaident pour des approches thérapeutiques destinées soit à cibler les astrocytes anormaux, soit à les remplacer par des astrocytes “normaux” grâce à des technologies de transplantation cellulaire. Nous avons ciblé une région où résident les neurones moteurs respiratoires, la moelle épinière cervicale. Ce site a été choisi car la majorité des patients atteints de SLA meurent d'insuffisance respiratoire. Notre hypothèse était que, en remplaçant les astrocytes malades dans cette région, nous pourrions être capables de préserver ou retarder le déclin respiratoire et, par conséquent, améliorer l'évolution des patients».
Quant aux essais cliniques chez l'humain, le Dr Maragakis répond avoir «déjà réfléchi à des stratégies pour délivrer les cellules chez des patients». Cependant, ajoute-t-il, «de telles stratégies de remplacement ne sont pas encore prêtes pour l'application clinique… La prochaine étape consistera à utiliser les cellules progénitrices d'astrocytes humains dans le même modèle de rongeur. Si les résultats sont prometteurs, nous envisagerons des essais chez des patients, mais ce n'est pas dans l'immédiat».
Lepore et coll. « Nature Neuroscience », 19 octobre 2008, DOI : 10.1038/nn.2210.
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