Une étude rassure sur les risques du téléphone portable et relance le débat

Publié le 27/07/2011
1311782088274315_IMG_65529_HR.jpg

1311782088274315_IMG_65529_HR.jpg

La nocivité des ondes sur le cerveau fait toujours débat. Si les résultats des premières études épidémiologiques ont été plutôt rassurants, en montrant qu’il n’y avait pas de preuve répétée et définitive d’un lien entre les ondes émises par les portables et le risque du cancer, une monographie du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), une agence de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) a récemment conclu que les téléphones cellulaires pouvaient être « possiblement cancérigènes pour les humains » (groupe 2 B)semant le doute chez le grand public et les médias, rappelle dans un éditorial John D. Boice et Robert E. Tarone (« le Quotidien » du 01/06/2011).

L’étude de Denis Aydin et coll. s’invite dans cette discussion, en évaluant pour la première fois les risques de cancers cérébraux liés aux portables chez les enfants et adolescents. Les chercheurs ont lancé en 2006 une étude cas-témoins, CEFALO, incluant des enfants de 7 à 19 ans, habitant au Danemark, en Norvège, en Suisse et en Suède. Ont été pris en compte 352 cas de tumeurs du système nerveux central diagnostiqués entre 2004 et 2008 ainsi que, selon un ratio d’1 pour 2, 646 témoins, sélectionnés au hasard. Les chercheurs ont ensuite évalué l’usage du téléphone portable au cours d’entretiens face à face avec l’enfant, accompagné d’un parent, et à l’aide des relevés fournis parfois par les opérateurs.

Plus de 75 % des patients, et 72,1 % des témoins disent avoir téléphoné avec un mobile plus de 20 fois avant le diagnostic. L’usage régulier du portable est attesté pour 55 % des cas, et 51 % des témoins. « Les patients atteints d’une tumeur cérébrale n’étaient pas, de manière significative, davantage usagers de portable que les cas témoins », conclut l’étude. Un constat qui se vérifie également lorsqu’on considère d’autres variables d’exposition comme le temps passé depuis la première utilisation, la durée cumulée des appels et du nombre d’appels. « Les enfants qui ont commencé à utiliser des téléphones portables au moins 5 ans auparavant n’étaient pas exposés à un plus grand risque que ceux qui n’avaient jamais eu d’utilisation régulière », soulignent Aydin et coll.

Des études encore nécessaires.

La localisation du téléphone sur un unique côté de la tête semble n’avoir pas non plus d’influence significative, malgré le fait que les radiations se concentrent à l’endroit où l’objet est tenu. « Le risque de tumeur cérébrale parmi les utilisateurs qui appliquent leur téléphone d’un seul côté n’est pas plus grande que celle des utilisateurs qui portent leur mobile des deux côtés », relèvent les auteurs.

Les chercheurs ont aussi évalué le risque de tumeurs lié à d’autres sources de champs électromagnétiques, comme les espions pour les enfants en bas âge. Les conclusions sont similaires : « Nous n’avons trouvé aucune preuve d’une relation entre l’usage d’espion et le risque de tumeur ».

En revanche, l’étude d’un panel restreint de participants (163), pour qui les opérateurs téléphoniques possédaient les données depuis les premières suscriptions, a révélé un risque significativement plus grand pour les usagers inscrits depuis longtemps. Toutefois, les chercheurs relativisent la portée de ce résultat. Si les données enregistrées par les opérateurs sont plus sûres que les dires des enfants interviewés, elles ne concernent qu’un petit nombre de cas et ne prennent pas en compte certains aléas, comme le fait que l’enfant ait pu prêter son portable, ou emprunter celui d’autrui. En outre, certains parents ont pu être prompts à offrir un portable à leur enfant atteint d’une tumeur, en cas d’urgence ou pour réduire l’isolement.

In fine, si leurs conclusions sont renforcées par le constat que nulle part dans le monde, il n’a été observé d’augmentation des cancers du cerveau, alors que l’utilisation des téléphones se généralise et que le mobile est devenu un accessoire indispensable, les chercheurs invitent à la prudence. « Nous ne pouvons pas éliminer la possibilité que le portable n’ait pas une minime influence dans l’augmentation des risques, et nous soulignons l’importance de futures études », indiquent-ils. Une conclusion que partagent les éditorialistes John D. Boice et Robert E. Tarone : « Il est impossible de prouver l’absence d’effet », précisent-ils.

 COLINE GARRÉ

Source : lequotidiendumedecin.fr