DE NOTRE CORRESPONDANTE
LES PERSONNES qui consomment régulièrement des poissons de fleuve ont un taux de PCB quatre ou cinq fois supérieur à la moyenne. C'est ce qu'a révélé l'enquête financée par le WWF-France et réalisée par l'Association santé environnement Provence (ASEP) sur l'imprégnation des populations habitant près des fleuves pollués au pyralène, un PCB (PolyChloroBiphényle), et présentée tout récemment à Marseille. Cette première étude menée en France a été réalisée à partir de trois groupes : un groupe de personnes habitant près d'un fleuve et consommant du poisson au moins une fois par semaine ; un groupe de personnes habitant près du fleuve, mais ne mangeant pas de poisson ; et un groupe témoin. Au total, 52 prélèvements ont pu être faits en mars et en avril et étudiés ensuite. Ils révèlent un taux de 70 picogrammes dans le sang en moyenne, avec un pic à 572 pour un pêcheur de 83 ans qui a toujours bu l'eau de la Seine et mangé du poisson quatre ou cinq fois par semaine. Le taux normal selon les médecins se situe entre 5 et 15 picogrammes. Des taux élevés ont été également constatés chez d'autres personnes, dont un médecin arlésien, grand amateur de pêche.
«Tout le monde a des PCB en lui, mais ce taux est quatre ou cinq fois supérieur chez ceux qui ont mangé du poisson, a expliqué le Dr Pierre Souvet, président de l'ASEP. Avant d'ajouter : Il faut briser le culte du secret. C'est une contamination sérieuse que les pouvoirs publics ne doivent pas minimiser.»
L'étude apporte «plus de questions que de réponses», indique encore le Dr Patrice Halimi, secrétaire général de l'ASEP, qui réfute les critiques sur la méthodologie employée, qui ne permet pas de savoir, par exemple, si les taux élevés sont liés uniquement à la consommation de poisson. Mais il assure qu'il s'agit d'un important problème de santé publique. «Sans vouloir dramatiser, ces taux nous mettent en garde.»
Risque de cancers.
Selon les médecins de l'ASEP, la présence de taux importants de PCB dans le corps augmente le risque de cancers (notamment du sein, du foie et colo-rectal), de troubles de la fertilité, de déficits immunitaires et de troubles neurologiques. Il n'existe pour l'instant aucune étude en France sur les conséquences de la contamination aux PCB, mais deux études réalisées aux États-Unis et en Espagne révèlent des maladies, notamment des cancers provoqués par cette imprégnation. L'État, d'ailleurs, commence à réagir. En France, la première étude d'imprégnation aux PCB sera lancée auprès des pêcheurs-consommateurs des poissons de rivière, sous l'égide de l'Agence française de sécurité sanitaire. Elle durera deux ans.
L'ASEP, pour sa part, fort de ses 300 membres médecins, continue d'alerter sur tout ce qui touche les relations santé et environnement, réclamant partout où cela s'impose des études et des mesures pour lutter contre la recrudescence de maladies liées à la pollution ou aux contaminations. Sa prochaine conférence aura lieu le 13 juin à Grenoble sur « pollution atmosphérique et pathologies respiratoires ».
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