« Nos données confortent l'hypothèse selon laquelle les individus tendant à avoir un état d'esprit négatif ont une réponse immunitaire plus faible que ceux au style de vie positif, et ont de ce fait un risque plus élevé de maladies », écrivent les membres du Laboratory of Affective Neuroscience de l'université de Wisconsin. Ils montrent qu'il existe des différences entre les styles de comportement, qui se traduisent à la fois sur la réactivité affective et la réaction immunitaire.
L'étude a impliqué 52 personnes (dont 24 femmes), à qui l'on a fait réaliser une rédaction d'épisodes autobiographiques, tâche de nature à induire « des changements durables et intenses de l'état émotionnel ». Les patients ont été invités à se remémorer et à relater par écrit d'abord la meilleure chose qui leur soit arrivée dans l'existence (expérience extrêmement positive), puis l'événement le plus malheureux (expérience extrêmement négative). Des mesures EEG ont été réalisées au moment des tâches émotionnelles pour la mise en évidence d'une activation préfrontale droite. Il faut savoir que des travaux antérieurs ont montré (chez des droitiers) que les individus ayant une plus grande activité basale sont aussi ceux présentant un état d'esprit à tendance négative ainsi qu'une plus forte réactivité à des épreuves affectives négatives.
Une vaccination contre la grippe
Cette réactivité aux affects négatifs a été mesurée sur l'amplitude du réflexe cochléo-palpébral (fermeture des paupières lors d'un son brusque de 95 dB) à l'aide d'électrodes posées sur des muscles oculaires. Enfin, la réaction biologique après une vaccination contre la grippe, chez ces individus non vaccinés, a servi à mesurer la réponse immunitaire.
Cette étude montre que « trois indicateurs physiologiques différents d'état d'esprit négatif prédisent une réponse par anticorps plus faible à la vaccination antigrippale ». Ce sont : une activité préfrontale droite de base plus élevée à l'EEG ; une plus forte potentialité d'activation de cette zone ; une plus grande amplitude de la réponse du réflexe oculo-palpébral en réponse à une induction affective négative.
Ces résultats confirment des données antérieures. D'abord un test in vitro, où l'on a montré une activité des lymphocytes NK diminuée en association à une activation préfrontale droite plus importante. Ensuite, il existe une abondante littérature clinique qui décrit les liens entre dépression et immunité. Depuis le début des années 1990, on sait que les individus souffrant de dépression majeure ou à rechute présentent plus souvent une activation préfrontale droite. La dépression a été associée à une plus grande morbi-mortalité (notamment en ce qui concerne les maladies cardio-vasculaires et auto-immunes) ainsi qu'à une diminution des marqueurs de l'immunocompétence.
La fonction dopaminergique est altérée
Les voies spécifiques responsables de l'association entre un état d'esprit orienté vers la négativité et les fonctions immunitaires ne sont pas déterminées dans ce travail. Les auteurs rappellent toutefois les données disponibles : des communications bidirectionnelles entre le cortex préfrontal et certaines cellules immunitaires ont été montrées. Par exemple, l'IL1, l'IL2 et l'IL6 altèrent l'activité dopaminergique au niveau du cortex préfrontal ; l'IL1 bêta augmente l'activité monoaminergique de ce site cortical en réponse à un stress léger. A l'inverse, la fonction dopaminergique du cortex préfrontal est altérée, de manière asymétrique, en réponse à un stress.
Les connexions avec le système immunitaire existent via l'axe hypophyso-hypothalamo-surrénalien, l'hippocampe et l'amygdale. Des manipulations fonctionnelles expérimentales de ces régions ont un impact sur les fonctions immunitaires.
Proc Natl Acad Sci. Edition avancée en ligne.
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