L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et la Caisse nationale de l’assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) publient aujourd’hui des résultats confirmant le caractère « hautement tératogène du valproate ».
Il s'agit du deuxième volet du programme d'études pharmaco-épidémiologiques lancé en 2015 afin d’évaluer, à partir des données du système national interrégimes de l’assurance maladie (SNIIRAM), la situation sanitaire engendrée par l’exposition de femmes enceintes à l’acide valproïque en France. Le premier volet publié en août 2016 avait évalué à 14 322 le nombre de femmes exposées pendant la grossesse entre 2007 et 2014 (près de 2 grossesses pour 1 000). Parmi elles, 8 204 ont été exposées à une spécialité indiquée dans l’épilepsie (Dépakine, Micropakine et génériques) et 6 149 femmes ont été exposées à une spécialité indiquée dans le trouble bipolaire (Dépakote et Dépamide).
Un risque 4 fois plus élevé qu'en population générale
Ce deuxième volet avait pour objectif principal d’estimer le risque de malformations congénitales majeures associé à l’exposition à ces médicaments. Le second objectif était de comparer ce risque à celui lié à l'exposition in utero aux autres traitements de l’épilepsie et des troubles bipolaires.
L'ANSM et la CNAMTS ont pour cela croisé les données d’exposition de 2 millions de femmes enceintes dont 2 321 ont été exposées au valproate avec les données relatives aux enfants nés de ces grossesses.
Les résultats confirment non seulement que l'exposition au valproate est hautement tératogène mais que le risque est deux fois plus élevé lorsque la femme a été traitée pour une épilepsie au lorsqu’elle l'a été pour un trouble bipolaire. « Le risque de malformations congénitales majeures, par rapport à la population générale, est globalement 4 fois plus élevé chez les enfants nés d’une femme traitée par valproate pour une épilepsie, alors qu’il est 2 fois plus élevé lorsqu’elle est traitée par valproate pour un trouble bipolaire », soulignent l'ANSM et la CNAMTS. Cette différence s'explique sans doute par le niveau d'exposition plus élevé dans le premier cas. Chez les femmes traitées pour un trouble bipolaire, les interruptions précoces de traitement sont en effet plus fréquentes et l’observance est moins bonne.
Entre 2 150 et 4 100 enfants
À partir de ces résultats, le nombre total d’enfants exposés in utero au valproate, atteints d’au moins une malformation congénitale majeure a pu être estimé : entre 2 150 et 4 100 seraient touchés depuis la commercialisation du valproate (1967-2016).
Le risque de malformation congénitale majeure « apparaît globalement moins marqué » en cas d'exposition aux autres médicaments prescrits dans l’épilepsie et dans les troubles bipolaires, « avec cependant des différences en fonction des substances ». Une évaluation de l'ensemble des antiépileptiques est en cours de finalisation.
Une estimation du risque de troubles neurodéveloppementaux fait l’objet d’une étude exploratoire dont les résultats sont attendus pour le second semestre 2017.
Depuis 2014 le valproate fait l'objet de mises en garde avec à partir de mai 2015 un renforcement des conditions de prescription et de délivrance (primoprescription annuelle par un médecin spécialiste, neurologue, psychiatre ou pédiatre et conditionnant la délivrance en pharmacie à la présentation d’un formulaire d’accord de soins cosigné par le médecin prescripteur et la patiente). En février 2016, après la publication d'un rapport de l'IGAS dénonçant un manque de réactivité des autorités, un plan d'action complété un mois plus tard par la mise en place d'une filière adaptée de diagnostic et de prise en charge des enfants souffrant des symptômes liés à l'exposition in utero. Depuis le 1er mars 2017, un nouveau pictogramme sur les boîtes de médicaments alerte sur les dangers en cas de grossesse.
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