DE 20 A 30 % des enfants maltraités deviennent à leur tour des parents maltraitants et 70 % des adultes maltraitants auraient eu dans l'enfance des antécédents de maltraitance. Alors, la violence familiale pourrait-elle être inscrite dans les gènes ? Ou est-elle plutôt liée à une histoire personnelle de maltraitance ? Différentes hypothèses existent. Le modèle social prend en compte un apprentissage du comportement influencé par des renforcements répétés puisés dans le modèle parental. Pour les théoriciens de l'attachement, c'est le modèle cognitif - représentations mentales et manières de penser - qui prime et influe en retour sur le comportement. Les neurobiologistes, pour leur part, estiment que la maltraitance subie au cours de la petite enfance peut produire des altérations à long terme sur le développement neuro-endocrinien et émotionnel. Et la génétique, dans tout ça ?
Captivité, entassement.
Pour répondre à cette question, un chercheur de Chicago, le Dr Maestripieri, a analysé le comportement de mères macaques biologiques et adoptives vivant en captivité et de leurs petits. En condition de privation sociale (captivité, entassement), les mères singes peuvent maltraiter leurs petits, en particulier au cours de leurs premiers mois de vie : elles marchent sur leur enfant, le traînent, le mordent, le jettent ou s'assoient dessus. Tous ces comportements peuvent entraîner un ensemble de conséquences allant de la simple contusion jusqu'au décès. Le chercheur a choisi de travailler dans un centre où vivent près de 1 500 macaques. Il a recensé dans cette population 16 singes femelles qui, au cours des premiers mois de leur vie, avaient été maltraitées par leur propre mère, biologique ou adoptive. Lorsqu'elles ont donné naissance à leur premier enfant, 9 de ces 16 mères ont reproduit un comportement de maltraitance. Aucune des femelles n'ayant subi de maltraitance n'a exercé d'actions violentes contre ses propres enfants.
Toutes les mères maltraitées ne sont pas à leur tour devenues maltraitantes, ce qui semble assez cohérent avec ce que l'on observe chez l'homme. Pour les auteurs, le facteur génétique pourrait intervenir dans la propension à développer un comportement antisocial ou des troubles de la personnalité à la suite d'une maltraitance dans l'enfance. A l'inverse, la résilience, ou faculté de surmonter sans morbidité les traumatismes de l'enfance, pourrait, elle aussi, dépendre de la présence de facteurs protecteurs biologiques ou environnementaux.
Ces résultats tendent à écarter l'influence génétique dans la transmission intergénérationnelle de la violence chez les macaques ; ils plaident plutôt en faveur de la résultante d'une expérience précoce.
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