UNE ÉQUIPE britannique est parvenue à traiter une adolescente atteinte d'une maladie génétique extrêmement invalidante, la déficience héréditaire en glycosyl phosphatidylinositol (GPI). En lui administrant du butyrate de sodium, Almeida et coll. ont réussi à rétablir une synthèse suffisante de GPI dans son organisme et obtenu ainsi une régression significative des symptômes de sa maladie, en particulier une suspension de ses crises d'épilepsie devenues résistantes à tous les traitements. La déficience héréditaire en GPI est une maladie autosomique récessive. Elle est associée à une mutation ponctuelle localisée dans le promoteur du gène PIGM codant pour la mannosyltransférase, une enzyme impliquée dans la biosynthèse du GPI. Cette mutation inhibe la fixation du facteur de transcription Sp1 au promoteur et conduit à une réduction drastique de l'expression du gène PIGM et, donc, de la synthèse du GPI. D'un point de vue clinique, la maladie se manifeste principalement par des thromboses veineuses splanchniques et des crises d'épilepsie.
L'interaction entre le facteur Sp1 et les promoteurs génétiques permet notamment le recrutement d'enzymes impliquées dans la modification des histones, un processus nécessaire à la transcription de l'ADN. Le butyrate de sodium est une substance capable de provoquer une hyperacétylation des histones et d'entraîner une augmentation du taux de transcription des gènes dont l'expression est contrôlée par le facteur Sp1. Almeida et coll. ont imaginé que son activité pouvait peut-être compenser l'effet de la mutation responsable de la déficience héréditaire en GPI, en induisant la transcription du gène PIGM malgré l'absence d'interaction en Sp1 et le promoteur génétique.
Très fréquentes et résistantes aux traitements.
Cette hypothèse a été testée chez une patiente âgée de 14 ans. Depuis près de cinq ans, la qualité de vie de la jeune fille était fortement altérée par des crises d'épilepsie très fréquentes et résistantes aux traitements disponibles. Depuis quelques mois, la fréquence de ces crises atteignait cinq par jour et la patiente n'était plus capable ni de marcher ni de se nourrir elle-même.
Les chercheurs ont tout d'abord testé l'effet du butyrate de sodium in vitro sur des lymphoblastes prélevés à la jeune fille et sur des cellules témoins, non mutées. Cette série d'expériences a montré que le butyrate de sodium permettait effectivement d'obtenir une hyperacétylation des histones et une augmentation de la transcription. Dans les cellules de la patiente, le taux de transcription du gène PIGM a été multiplié par 400 après adjonction de la substance.
Aucune cytotoxicité du butyrate de sodium ne semblant être associée à cet effet sur l'expression génétique, Almeida et coll. ont décidé d'administrer la substance à la patiente.
La jeune fille a reçu 20 mg/kg de butyrate de sodium trois fois par jour pendant huit semaines, puis 30 mg/kg, toujours trois fois par jour. Comme attendu, le traitement a entraîné une élévation de la transcription de PIGM et une augmentation de la quantité de GPI exprimé à la surface des cellules.
Au bout de deux semaines, la condition générale de la jeune fille s'était tellement améliorée qu'elle était capable de se lever, de marcher et de prendre son repas seule. Mieux encore, les crises d'épilepsie ont enfin cessé.
A. M. Almeida et coll., « N Engl J Med » du 19 avril 2007, pp. 1641-1647.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature