CINEMA
DE NOTRE ENVOYEE SPECIALE
RENEE CARTON
L E titre du livre de Pascale Froment (qui ressort en Folio) dit bien ce dont il s'agit : « Je te tue. Histoire vraie de Roberto Succo assassin sans raison ».
L'histoire commence donc avec la découverte de deux corps, en 1981, dans la banlieue de Venise, et se poursuit, à Toulon puis dans la région d'Annecy, dans le strict ordre chronologique, sans retour en arrière. Sans non plus montrer de scènes, et donc de meurtres, qui n'aient eus de témoin. Pour le réalisateur, il importait de ne pas faire de Succo un héros. « Le cinéma est un outil dangereux qui peut faire aimer n'importe qui », explique-t-il. Ce qu'il faut, c'est éviter l'identification totale et c'est pourquoi le spectateur n'est jamais seul avec Succo.
Le film s'en tient aux témoignages mais sans refuser le romanesque ou le spectaculaire, une certaine forme en tout cas. Il se « situe entre la biographie, le film d'amour, le polar et le documentaire », dit à juste titre son réalisateur. Et le suspense fonctionne, même si l'on connaît la fin de la cavale. Et l'histoire d'amour émeut, même si l'on ne sait rien ou presque de la jeune Léa. Et le travail d'enquête - médecine légale, recueil des indices, interrogatoire des témoins, rencontre avec le juge, etc. - n'est pas le moins passionnant.
Ce récit, qui a toutes les qualités de la simplicité en étant le contraire du simplisme, tourne autour de l'énigme de la folie meurtrière sans tenter de la pénétrer. Parce qu'il n'y a pas d'explication univoque, parce que les mystères de la psychose ne sont pas près d'être élucidés.
Prix Jean Vigo pour « Trop de bonheur » en 1994, prix Louis Delluc pour « l'Ennui » en 1998, Cédric Kahn montre son talent de cinéaste à s'adapter à des sujets très divers. Stefano Cassetti, qui n'était pas acteur au départ, donne au personnage de Succo une sincérité et une intensité rares. Isild Le Besco (vue dans « Sade » et « les Filles ne savent pas nager ») est juvénile et impulsive à souhait et les autres acteurs, dont Patrick Dell'Isola, sont à l'unisson, dirigés avec précision.
Un témoignage intelligent sur les dysfonctionnements de l'esprit humain, comme « la Pianiste » mais dans un tout autre genre, qui mériterait de figurer au palmarès.
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