PUBLIÉS début octobre dans l'édition en langue anglaise du « JAMA » (1), les résultats de la métaanalyse évaluant les thérapies psychodynamiques de longue durée ont été largement commentés outre-Atlantique, «peut-être marquent-ils un certain retour en grâce de la psychanalyse ou tout au moins le retour de la place centrale de la subjectivité du patient, explique le Pr Bruno Falissard. Il n'est pas rien que cet article ait été publié dans un organe majeur de communication de la médecine aux États-Unis, qui, de plus, est appuyé par un éditorial élogieux. Ce qui va bien sûr à l'encontre de la doxa que l'on avait l'habitude d'entendre.» Il faut souligner que cette revue quantitative de la littérature répond à une rigueur méthodologique, qui n'est pas si évidente à obtenir en pratique. Certes, elle a des limites, qui tiennent au principe même de la métaanalyse, en l'occurrence au fait que les essais négatifs, non publiés en général, ne sont de facto pas pris en compte.
Essais randomisés et études observationnelles.
L'analyse a porté sur 23 études, 11 essais randomisés et 12 études observationnelles, qui ont inclus plus de 1 000 patients présentant des troubles mentaux complexes, comme des troubles de la personnalité, des troubles mentaux chroniques, des troubles mentaux comorbides. «Afin de limiter l'impact du caractère“un peu flou” de cette définition, les données ont été recueillies par deux méthodologistes indépendants avec évaluation d'un accord inter-juge.»
Seules les psychothérapies dynamiques individuelles d'une durée supérieure à un an, ou 50 sessions, ont été comparées aux traitements contrôles, le plus souvent des psychothérapies brèves, parfois cognitives. L'analyse des données, qui portaient sur de nombreux critères, selon une méthodologie, là encore correcte, donne des résultats convergents et conclusifs : après thérapie psychodynamique de longue durée, les patients vont mieux. Par ailleurs, en se fondant sur un large faisceau de critères, le traitement au long cours fait plutôt mieux que l'ensemble des autres approches. «Enfin, ces patients, souligne Bruno Falissard, ont un profil qui correspond à celui de ceux rencontrés en consultation, notamment en pratique libérale.» Un élément qui donne encore plus de pertinence clinique à ce travail.
Des arguments pour un traitement intensif.
«Une donnée très importante de cette métaanalyse est la corrélation entre le niveau d'efficacité de la thérapie et non pas sa durée, mais le nombre de séances. Les patients ont bénéficié en moyenne de 130séances, dont les bénéfices ont été d'autant plus marqués qu'elles étaient rapprochées. Cela est tout à fait pertinent cliniquement et doit nous inciter à concentrer les soins plutôt qu'à les saupoudrer, poursuit Bruno Falissard.
Ce travail est également porteur d'enseignements utiles à notre réflexion sur l'évaluation des psychothérapies: 1) de tels essais sont possibles ; 2) ils ont bien entendu des limites (quid d'un placebo de psychothérapie, quid de la généralisation des résultats à la vraie vie, problème fréquemment rencontré dans les études randomisées). Il faut donc envisager des approches complémentaires, comme des études longitudinales de suivi de cas.»
D'après un entretien avec le Pr Bruno Falissard, université Paris-Sud, INSERM U 669, Maison de Solenn, Paris.
(1) Effectiveness of long-term psychodynamic-psychotherapy. Falk Leichsenring, Sven Rabung. JAMA. 2008;300(13):1551-65.
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