Lors d'une table ronde consacrée aux prothèses auditives, le Pr Garabédian a rappelé les principes de l'appareillage des enfants. D'une part, le dépistage de la surdité doit être précoce, et l'appareillage rapide et bien accepté par l'enfant. D'autre part, la prise en charge et le suivi doivent être multidisciplinaires.
LA SURDITÉ est un problème de santé publique, qui n'est qu'à moitié reconnu comme tel, et le premier déficit est celui du dépistage. Un enfant sur mille est atteint d'une surdité sévère, profonde ou totale à la naissance, et un enfant sur mille également devient sourd avant l'âge de 4 ans. Par ailleurs, l'efficacité de l'appareillage est d'autant plus grande que la prise en charge est précoce : l'audition est en effet nécessaire à la maturation des voies auditives, à l'acquisition du langage et à la mise en place d'une boucle audio-phonatoire. Un programme expérimental est en cours sur la faisabilité d'un dépistage à la naissance, associant la CNAMTS, l'Agence française pour le dépistage et la prévention des handicaps chez l'enfant (ADFDPHE, et le ministère de la Santé. Mais, pour le Pr Eréa-Noël Garabédian (hôpital Trousseau, Paris), ce dépistage doit se généraliser : «Le dépistage de la surdité devrait être réalisé comme les vaccinations.»
Les moyens du diagnostic.
Le diagnostic se base sur une audiométrie comportementale adaptée à l'âge de l'enfant, des mesures des otoémissions acoustiques provoquées (OEAP) et des potentiels évoqués auditifs précoces (PEATC), un scanner et/ou une IRM, un bilan génétique à visée étiologique et différents examens médicaux (protéinurie, ECG, fond d'oeil ou électrorétinogramme, etc.). Comme le dépistage, cette procédure diagnostique mériterait d'être améliorée. «Il est impensable d'annoncer à des parents que l'on a peut-être dépisté une surdité chez leur enfant, et d'attendre ensuite trois ou quatre mois les potentiels évoqués», affirme le Pr Garabédian.
L'appareillage peut être décidé pour une perte auditive moyenne ≥ 30 dB HL, et ≥ 35 dB HL sur la moyenne 2 000-4 000 Hz. Il est par ailleurs systématique en cas de surdité sévère ou profonde, et doit alors faire l'objet d'une évaluation durant un minimum de six mois, avant de discuter éventuellement d'une implantation cochléaire.
Des stratégies privilégiées.
En ce qui concerne la stratégie d'appareillage, on privilégie les contours d'oreilles, les embouts souples, la stéréophonie, même en cas de dissymétrie. Initialement, le gain doit être augmenté progressivement, en fonction de l'évolution de l'enfant et des résultats de l'audiométrie comportementale. Dans tous les cas, le critère pertinent est l'acceptabilité du dispositif. L'appareillage doit non seulement être le plus précoce possible, mais il doit viser à ne surtout pas dégoûter l'enfant. Selon le Pr Garabédian, «si la prothèse n'est pas portée, on va à l'échec».
Le suivi est multidisciplinaire. S'agissant de l'ORL, le suivi prothétique comporte six visites d'appareillage par an et quatre contrôles. A quoi s'ajoutent deux visites par an pour le suivi proprement médical, le cas échéant en liaison avec le radiologue, le généticien, l'ophtalmologiste.
Sans oublier les parents.
Ce suivi s'intègre par ailleurs dans une prise en charge orthophonique instaurée dès le début de l'appareillage, et dans un accompagnement plus large, pouvant comporter des psychologues, des instituteurs, des éducateurs et autres intervenants spécialisés. Les troubles moteurs, sensoriels et intellectuels décuplent en effet l'impact de la surdité. Enfin, les parents, parfois membres d'une association spécialisée, doivent eux aussi être pris en charge, l'objectif étant toujours d'obtenir un port régulier de l'appareil le plus tôt possible.
D'après une table ronde sur la prothèse auditive avec le Pr Christian Dubreuil (centre hospitalier Lyon-Sud), le Pr Olivier Sterkers (hôpital Beaujon, Clichy), le Dr Christophe Vincent (CHU de Lille), le Pr Eréa-Noël Garabédian (hôpital Trousseau, Paris), le Dr Eric Bizaguet (président du Collège national des audioprothésistes), Benoît Roy (président de l'Union nationale des syndicats d'audioprothésistes français).
La collaboration entre ORL et audioprothésistes
Les audioprothésistes aussi bien que les ORL souhaitent une collaboration renforcée entre les deux spécialités. Et cette collaboration sera encore plus nécessaire lorsque le dépistage néonatal systématique sera instauré. Pour le Pr Garabédian, en effet, «peu d'audioprothésistes ont l'habitude des très petits enfants». Le Dr Bizaguet (président du Collège national des audioprothésistes) reconnaît en effet que «la perspective du dépistage néonatal pose un problème de formation aux audioprothésistes».
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