Les syndicats de médecins libéraux ont réagi vivement dès qu'ils ont eu connaissance des conclusions du rapport sur la canicule ; ils refusent d'être « les boucs émissaires » de la crise sanitaire de l'été.
A peine le rapport était-il remis au ministre de la Santé qu'une pluie de communiqués de presse tombait pour, à la fois, nier la désertion des libéraux et appeler à cesser la polémique.
MG-France dénonce un rapport « hémiplégique », bien argumenté pour le versant hospitalier « décrit sur 44 de ses 47 pages », mais empli de « jugements de valeur inadmissibles, émis à partir de propos ou d'opinions rapportés » dans les deux pages qui évoquent le rôle des médecins de ville.
De même, à l'UNOF, premier syndicat de médecins généralistes, membre de la la CSMF, on critique une « appréciation floue » de la situation et on juge « regrettable » la mise en cause des médecins libéraux dans la crise. « Il faut arrêter de dire qu'il y avait trop de médecins en vacances, affirme le président de l'UNOF, le Dr Michel Combier. C'est vrai que certains étaient partis, mais ça n'aurait peut-être rien changé s'ils avaient été plus nombreux, car le nombre de décès était énorme. Qu'on se le dise : on n'aura jamais les moyens pour faire face à ce type de crise. Il s'agissait de patients très fragiles, dont les familles étaient parfois absentes. Les médecins ont fait leur boulot : tout ce qu'ils pouvaient dire, c'était de boire beaucoup. Et encore, à condition qu'ils aient été appelés. Dans les cas où ils étaient rappelés trois heures plus tard car la situation avait empiré, c'était souvent trop tard. Je trouve donc idiot de culpabiliser les uns ou les autres. »
Un discours repris par bon nombre de parlementaires, y compris de droite. Ainsi, Bernard Accoyer, premier vice-président du groupe UMP à l'Assemblée, a estimé mardi qu' « il fallait se garder de stigmatiser les médecins généralistes » après le drame de la canicule. Il a affirmé que « de très nombreux parlementaires » du groupe UMP soutiennent « un corps qui est probablement celui qui apporte le plus aux personnes âgées qui restent à domicile ».
Le jeu de la patate chaude
Au SML et à la CSMF, de même, on refuse la culpabilisation de la profession. Pour le Dr Michel Chassang, président de la CSMF, « le petit jeu de la patate chaude ou du bouc émissaire continue. Après le gouvernement, les administrations, les politiques, voici venu celui des libéraux ». Le président du SML avoue « ne pas comprendre cette focalisation sur les médecins libéraux, sauf à poursuivre dans la recherche de boucs émissaires ». « D'un côté, estime le Dr Dinorino Cabrera, le lynchage médiatique de Jean-François Mattei est scandaleux. De l'autre, j'interdis de dire que la catastrophe est la conséquence directe d'un manque de médecins. Ils ont le droit, eux aussi, de partir en vacances. Nous avons vécu un tremblement de terre qui n'était pas prévisible. »
L'exemple du fonctionnement de la garde médicale de Paris (GMP), qui organise le tour de garde des généralistes dans Paris intra muros, illustre la façon dont les médecins se sont répartis les appels cet été. D'après la GMP, il y avait entre le 1er et le 31 août 47 généralistes sur Paris, qui ont reçu 1 326 demandes de visites ; 80 % ont été assumées, les autres ont été dirigées vers les urgences médicales de Paris (UMP). Conclusion de la GMP : « Beaucoup de médecins étaient en vacances certes, nous aurions pu mieux faire certes, mais notre service de garde n'a pas démérité. »
MG-France s'appuie également sur certains chiffres - en août 2002, l'activité des généralistes a représenté 80 % de l'activité moyenne mensuelle observée en 2002 - pour affirmer que cette année, comme l'an passé, « il n'y a pas eu désertion ».
Mais désertion ou pas, les morts sont là. Pour éviter une nouvelle catastrophe, le Dr Cabrera demande « beaucoup plus d'auxiliaires de vie pour assister les personnes âgées ». Le Dr Combier souhaite, pour sa part, la mise en place rapide de « structures d'alerte, s'appuyant notamment sur les professionnels libéraux de proximité, qui permettent d'informer en temps réel ». Quant au Dr Michel Chassang, président de la CSMF, il demande « la parution immédiate du décret sur la permanence des soins ».
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