Le Généraliste. L'épidémie de rougeole se poursuit en France, faut-il incriminer les insuffisances de la vaccination ?
Pr Jean Beytout. L'épidémie de rougeole a fortement augmenté début 2011 pour toucher pratiquement tout le territoire avec un pic en mars/avril et plus de 100 00 cas déclarés en 2011 pour moins de 4 000 en 2010. L'épidémie s'atténue actuellement. Elle touche des enfants essentiellement dans des groupes non vaccinés pour des raisons philosophiques et religieuses mais elle concerne également de jeunes adultes non ou insuffisamment vaccinés et ayant échappé antérieurement à la rougeole naturelle. On a observé des cas de rougeoles nosocomiales touchant soignants et patients, alors qu'il est fortement recommandé de vacciner tous les futurs professionnels de santé au début de leurs études et de mettre à jour les vaccins chez ceux qui travaillent au contact des enfants et des immuno-déprimés, qui doivent avoir reçu les deux injections sauf en cas d'antécédent de rougeole authentifiée. Une circulaire récente de la DGS préconise de vacciner les adultes nés après 1980.
Quelles sont les autres infections qui posent problème en France ?
Pr J. B. Il existe aussi une épidémie de varicelle mais la vaccination généralisée n'est pas recommandée. En revanche, la question se pose chez les adolescentes ou les jeunes femmes pour éviter la survenue d'une varicelle pendant la grossesse.
Les cas de coqueluche ou apparentés sont toujours nombreux. La maladie touche les personnes âgées et pose des problèmes aux médecins, en particulier dans les EHPAD, dans lesquels on observe des épidémies de coqueluche - mais aussi de virus respiratoire syncitial -. La vaccination contre la coqueluche vise les jeunes adultes susceptibles d'être parents pour ne pas contaminer les nourrissons qui n'auraient pas eu le temps d'acquérir l'immunité et la coqueluche. Ainsi, elle passe - peut-être à tort - pour peu grave chez l'adulte, même si la toux est très gênante et susceptible de complications.
La vaccination contre le méningocoque figure dans le calendrier 2011/2012 ?
Pr J. B. On ne dispose toujours pas de vaccin contre le méningocoque B. La vaccination généralisée contre le méningocoque C figure dans les deux derniers calendriers mais elle est insuffisamment assurée alors qu'une seule injection du vaccin conjugué suffit pour éviter méningite et purpura fulminans. Il n'est pas inutile de rappeler que tous les jeunes de 1 à 25 ans devraient en bénéficier, quel que soit le moment, à moins qu'ils n'aient été préalablement vaccinés lors des campagnes de 2002/2004 dans le Puy-de-Dôme, les Landes, les Hautes-Pyrénées ou les Pyrénées Atlantiques ou la Haute-Vienne. Il est encore trop tôt pour dire quelles seront les modifications vaccinales en 2012.
Quelles sont les prévisions pour la grippe ?
Pr J. B. On s'attend à voir circuler la souche A pandémique, comme l'an dernier. Elle figure dans le vaccin saisonnier actuel et il faut vacciner tous ceux qui ont des facteurs de risque : cardiaques, insuffisants respiratoires, rénaux et même les sujets jeunes qui sont susceptibles de faire des formes graves. Et comme tous les ans on rappelle que les professionnels de santé devraient aussi se faire vacciner. D’autant que, pour eux, la vaccination est désormais prise en charge à 100% par la sécurité sociale.
La vaccination contre la tuberculose reste inchangée ?
Pr J. B. La tuberculose continue à régresser en France métropolitaine d'après le dernier bilan 2009 mais on observe des "poches" avec des «épidémies» concernant un ou plusieurs cas, en particulier en Seine-Saint-Denis dans des zones où l'habitat est précaire et les gens originaires de régions de forte endémie avec un fort risque de contagiosité. Ces cas ne remettent pas en cause la suppression de la vaccination pour l'ensemble de la population. La vaccination est maintenue pour les nouveau-nés d'Île de France; elle est particulièrement recommandée pour les enfants des départements d'Outre-Mer en particulier en Guyane et à Mayotte où cette endémie pose de véritables problèmes.
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