Une convention antitabac, bientôt adoptée à l'OMS

L'Organisation mondiale de la santé (OMS), dont les 192 Etats membres s'apprêtent à adopter la première convention-cadre antitabac, se dit persuadée que les « mauvais coups » de l'industrie tabacole se feront sentir jusqu'à l'entrée en vigueur du texte. Le Dr Derek Yach, directeur à l'OMS des maladies non transmissibles, en veut pour preuve un document interne, récemment révélé, du cigarettier britannique BAT. Il contredit, souligne-t-il, « les engagements d'honnêteté, de transparence et de responsabilité » clamés haut et fort par les compagnies de tabac peu après l'accord sur le texte de l'OMS conclu à Genève en mars dernier. Ce document, envoyé par e-mail dès 1999, avant le lancement des négociations OMS, demandait à tous les responsables de BAT dans le monde de prendre contact avec les personnes les mieux disposées dans les différents ministères des gouvernements concernés (Santé, Justice, Environnement, Travail), pour lutter contre la future convention-cadre de l'OMS antitabac. « Il suggère que la campagne de coups bas se poursuive jusqu'à aujourd'hui. » Et, affirme le Dr Derek Yach, « nous ne doutons pas qu'elle se poursuivra même dans la phase de mise en œuvre ».
Le projet de traité devrait être adopté formellement à la majorité des deux tiers, demain 21 mai, par l'Organisation mondiale de la santé. Les Etats-Unis et la République dominicaine ont exprimé, d'ores et déjà, des réserves, ainsi que l'Allemagne, dont cependant la position pourrait évoluer. « Les Américains sont engagés dans un exercice diplomatique pour voir quels sont les Etats qui soutiennent leur idée d'une clause de réserve », commente le Dr Derek Yach, tout en estimant inimaginable que le traité ne soit pas adopté. Il sera ouvert à la signature le 16 juin et entrera en vigueur quand 40 pays l'auront ratifié. Ainsi, entre l'adoption et la première réunion des Etats parties, il pourrait s'écouler entre huit et dix-huit mois. Les Etats signataires s'engageront à adapter ou à renforcer leur législation, pour protéger leur population des fumeurs, dans les lieux publics, les entreprises et les transports. L'obligation de faire porter des avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes, la sensibilisation du public, l'interdiction de vente aux mineurs, le traitement de la dépendance ou encore l'adoption de mesures pour lutter contre la contrebande figurent dans la convention de l'OMS.
L'Organisation mondiale de la santé, qui a lancé l'idée d'un traité international de santé publique antitabac en 1999, rappelle que 4,9 millions de personnes sont mortes en 2002 à cause du tabagisme. Sans intervention coordonnée au niveau mondial, ce chiffre augmentera, jusqu'à atteindre 10 millions de morts par an d'ici à 2020.