Si les effets sur la santé de l'exposition à l'amiante sont désormais bien connus, il reste toujours difficile de dire quand ils vont apparaître. Le temps de latence très élevé de cette maladie implique en fait une surveillance des personnes exposées qui se poursuit nettement au-delà du cadre d'exercice de la médecine du travail.
C'est au médecin généraliste, capable de relayer l'information et de repérer les personnes à risque, qu'incombe le suivi post-professionnel de ces personnes, notamment pour entamer sans délai les éventuelles procédures d'indemnisation.
Les différents niveaux de risque et d'exposition
Le décret de février 1996 définit trois secteurs d'activité comportant ou pouvant comporter une exposition professionnelle :
- Secteur 1 : fabrication et transformation des matériaux contenant de l'amiante.
- Secteur 2 : confinement et retrait de l'amiante.
- Secteur 3 : intervention sur des matériaux ou des appareils susceptibles de libérer des fibres d'amiante.
Actuellement, il est recommandé de proposer une surveillance à toute personne ayant travaillé dans une entreprise secteur 1 ou 2, ainsi qu'à toute personne ayant eu un emploi correspondant au secteur 3. L'importance d'une surveillance toute la vie durant pour les personnes ayant été exposées à l'amiante est justifiée - en dehors même du temps de latence qui peut atteindre 40 ans - par la relation dose-effet clairement établie et les retentissements possibles sur la condition respiratoire indépendamment du risque asbestosique (événements respiratoires intercurrents, bronchopathie chronique liée au tabac...).
Evaluer l'exposition
La première étape d'un bilan consiste à évaluer l'importance de l'exposition. Dans le secteur industriel où le risque est désormais connu, la surveillance est relativement bien codifiée et relève de la médecine du travail. La conférence de consensus consacrée à ce sujet a proposé une classification de l'importance de l'exposition en trois niveaux. L'exposition est considérée comme importante si elle est certaine, élevée, continue sur une durée supérieure ou égale à un an dans le secteur de la fabrication en transformation de matériaux contenant de l'amiante. Le risque est considéré également comme élevé si l'exposition est discontinue mais d'une durée supérieure ou égale à dix ans (mécaniciens rectifieurs de freins de poids lourds, tronçonnage de l'amiante-cime...). A l'inverse, une exposition passive (travail dans un local contenant de l'amiante floquée ou non) est considérée comme faible. Entre ces deux catégories existe un niveau intermédiaire (interventions sur des matériaux ou des appareils susceptibles de libérer des fibres d'amiante).
Examen clinique, RP et EFR
La première étape d'une surveillance consistera à établir une évaluation individuelle du niveau d'exposition passée ; pour cela, on emploiera les outils méthodologiques disponibles (guide officiel des niveaux d'exposition des entreprises, matrices emploi-exposition, grille standardisée). La pratique d'un bilan de référence prend toute son importance par la multiplicité des causes pouvant affecter la fonction respiratoire : vieillissement physiologique, bronchopathie chronique, tabac...
En pratique, en l'absence d'activité, le suivi d'un ancien salarié doit comprendre, tous les 2 ans, un examen clinique, un examen radiologique et éventuellement des explorations fonctionnelles respiratoires. Ces examens sont pris en charge par le Fonds d'action sanitaire et social. Il semblerait que la TDM soit plus sensible que la radiologie pour le dépistage des nodules pulmonaires, de la pathologie interstitielle diffuse et de la détection de plaques pleurales. La recherche de marqueurs d'exposition (corps asbestosiques) et la pratique d'endoscopies ne doivent pas faire partie des bilans de dépistage. Les modalités pratiques des dépistages dépendent de l'importance de l'exposition (voir tableau).
Le dépistage des pathologies liées à l'amiante passe par des examens simples au premier rang desquels figurent l'examen clinique et la RP. Encore faut-il que les patients bénéficient de la surveillance adaptée. Or, les pathologies pulmonaires associées (bronchites chroniques, tabagisme...) et le passé lointain de l'exposition sont autant de facteurs d'égarement du diagnostic initial. Les consultations spécialisées de pneumologie, voire de prise en charge spécifique de l'amiante telle que celle du CHU de Nancy, peuvent naturellement assurer ce type de surveillance et mettre en route les procédures d'indemnisations afférentes. Le médecin généraliste, souvent seul à être resté en contact avec le patient des années après l'exposition, a un rôle essentiel dans l'organisation de ce dépistage.
Premières indemnisations avant la fin de l'année
La ministre de l'Emploi et de la solidarité a annoncé devant les députés que les premières indemnisations interviendraient « avant la fin de l'année ». Le décret d'application relatif au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), créé par la loi de financement de la Sécurité sociale adoptée en 2000, doit être publié ces jours-ci au « Journal officiel ». Elisabeth Guigou a précisé qu'il serait doté de 0,50 milliard d'euros (3,3 milliards de francs) de ressources dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.
Les modalités du suivi
Expositions fortes | Expositions intermédiaires | |
. |
||
Date du début de la surveillance |
10 ans après le début de | 20 ans après le début de |
par bilans périodiques | l'exposition | l'exposition |
. |
||
Examen clinique |
Tous les 2 anx | Tous les 2 ans |
. |
||
Radiologie thoracique |
Tous les 2 ans | Tous les 2 ans |
. |
||
TDM |
Lors du premier bilan puis tous les | Lors du premier bilan, si anomalie à |
6 ans | la RP sinon au bilan de la 10e | |
année puis tous les 10 ans | ||
. |
||
EFR : spirométrie + courbe débit- |
Lors du premier bilan puis tous les | Lors du premier bilan puis au bilan |
volume | 6 ans | de la 10e année puis tous les |
10 ans | ||
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