Les recommandations américaines en matière de dépistage du cancer du côlon, préconisent, après une coloscopie négative chez un patient sans facteur de risque, qu'une période de 10 ans puisse être observée avant un nouvel examen. Cette durée est jugée trop longue par certains cancérologues, qui estiment que la qualité d'une coloscopie reste très variable, et que, dans certains cas, la carcinogenèse colique peut impliquer des transitions plus rapides entre lésion précancéreuse et tumeur invasive.
Cette crainte serait non fondée, si l'on en croit les derniers travaux menés par le Dr Jeffrey Lee (département de gastroentérologie du système privé de santé Kaiser Permanente) et ses collègues, publiés dans le « JAMA Internal Medicine ». Selon leurs données issues d'une cohorte rétrospective, une coloscopie négative est associée à une diminution de moitié du risque de cancer du côlon tout au long des 10 années suivantes et à une réduction de 88 % du risque de décès par cancer sur la même période.
Une population à risque moyen
Des données issues d'une cohorte rétrospective incluant près de 1,3 million de patients (dont 614 000 hommes), d'un âge médian de 55,6 ans, éligibles au dépistage du cancer du côlon ont été analysées par les auteurs. Tous les participants ont un risque de cancer colorectal moyen, c’est-à-dire pas ne présentant pas d'antécédent de cancer ou de polype, pas de MICI ni d'antécédents familiaux de cancer du côlon.
Chaque participant a contribué au « suivi sans dépistage », depuis son entrée dans la cohorte jusqu'au moment où il a participé au dépistage (test Hémoccult, sigmoïdoscopie ou coloscopie). À partir du moment où un participant de la cohorte bénéficie d'une coloscopie, et que cette dernière ne met pas en évidence une anomalie, il participe au « suivi après coloscopie négative ».
L'objectif des chercheurs était de comparer le suivi sans dépistage et le suivi après une coloscopie négative, afin de voir dans quelle mesure l'absence d'anomalie détectée lors d'une coloscopie « garantit » une diminution du risque de cancer dans les 10 ans qui suivent.
Moins de cancers, et à un stade moins avancé
Au cours du suivi sans dépistage (4,6 millions de personnes années), un total de 5 743 cas de cancers colorectaux a été diagnostiqué. Il s'agissait, dans 31,7 % des cas, de cancers localisés au niveau du côlon droit et, dans 45,1 % des cas, de cancers diagnostiqués à un stade avancé. Au cours du suivi après une coloscopie négative (418 000 personnes années), 184 cancers colorectaux ont été diagnostiqués, dont 51,1 % localisés dans le côlon droit et 49,5 % à un stade avancé.
Après ajustement pour les cofacteurs de risque (âge, sexe, ethnie, index de comorbidités et indice de masse corporelle), les patients dépistés avaient un risque de cancer du côlon et de décès lié à la pathologie tumorale significativement réduit, même 12 ans après l'examen. Sur une période de 10 ans, cela traduit une réduction de 46 % du risque de développer un cancer et de 88 % du risque de décès. Assez logiquement, la réduction du risque de cancer colorectal est surtout significative au cours des 2 premières années de suivi (-95 %).
En France, le dépistage organisé du cancer colorectal de la population générale s'appuie depuis 2015 sur la réalisation d'un test immunologique tous les 2 ans. En cas de positivité du test, une coloscopie est proposée. Si la coloscopie est négative, le consultant est réinclus dans le programme de dépistage organisé après un délai de 5 ans.
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