LES ANALYSES génétiques et biochimiques ont révélé la présence d’un rythme circadien de vingt-quatre heures dans tout le règne animal. Chez les mammifères, le rythme circadien régule de nombreux aspects du comportement et de la physiologie, dont le cycle veille-sommeil, la tension artérielle (TA), la température corporelle et le métabolisme. Toute perturbation dans ces rythmes circadiens conduit à un risque accru de nombreuses maladies, comme le cancer et la maladie mentale. Le trouble bipolaire, en particulier, est associé à une perturbation du rythme circadien.
Des rythmes de vingt-quatre heures.
Les cellules dans l’organisme présentent également des rythmes sur vingt-quatre heures ; ces rythmes sont entraînés par des signaux venant d’une horloge centrale résidant dans l’hypothalamus, réajustée tous les jours par la lumière. Ces rythmes cellulaires sont déclarés et maintenus par un feed-back transcriptionnel interconnecté de gènes d’horloge. Le cycle commence lorsque deux protéines, BMAL1 et CLOCK, activent un certain nombre de gènes d’horloge (per1, per2, Cry1, Cry2). En tant que boucle de feed-back négatif, les protéines PER et CRY s’accumulent dans le cytoplasme, puis pénètrent dans le noyau. Une fois dans le noyau, le complexe PER-CRY inhibe sa propre transcription en se liant à BMAL-CLOCK. Une autre boucle de feed-back négatif nécessite la fonction répressive du récepteur nucléaire Rev-erb alpha, un composant clé de l’horloge, qui existe dans la plupart des cellules de l’organisme. Rev-erb alpha réprime la transcription du gène d’horloge Bmal1 durant la nuit circadienne ; mais, pendant le cycle circadien de vingt-quatre heures, la protéine Rev-erb est détruite dans la cellule, ce qui permet à Bmal1 d’augmenter ; et Bmal1, à son tour, entraîne une hausse de Rev-erb, ce qui de nouveau inhibe Bmal1. De sorte que, pendant le cycle circadien de vingt-quatre heures, les taux de Rev-erb et Bmal1 oscillent dans la cellule.
On sait depuis une dizaine d’années que le lithium, un médicament couramment utilisé pour traiter le trouble bipolaire, inhibe la glycogène synthèse kinase-3 (GSK3), une enzyme qui régule le rythme circadien par un mécanisme jusqu’ici inconnu. Dans la présente étude, l’équipe de Mitchell Lazar et Peter Klein (University of Pennsylvania School of Medicine) démontre que, en fait, l’enzyme GSK3 phosphoryle et stabilise la protéine Rev-erb, le régulateur négatif de l’horloge.
Le traitement des cellules par le lithium entraîne, en inhibant la GSK3, une dégradation rapide par le protéasome de la protéine Rev-erb, ce qui active le gène d’horloge Bmal1.
«Il est possible qu’un effet du lithium remette en marche les horloges qui se bloquent lorsque la protéine Rev-erb s’accumule», suggère le Dr Lazar dans un communiqué.
Ces résultats désignent donc la protéine Rev-erb comme un composant sensible au lithium de l’horloge humaine et, par conséquent, une cible pour développer de nouveaux médicaments pour les troubles circadiens.
«Compte tenu de la toxicité des traitements actuels, nous suggérons que de nouvelles approches ciblant la dégradation rev-erb alpha pourraient être prometteuses dans le traitement des troubles bipolaires et circadiens», concluent les chercheurs.
Diabète et obésité.
Après avoir noté la présence de la protéine Rev-erb dans les tissus métaboliquement actifs, le Dr Lazar et coll. à l’institut pour le diabète, l’obésité et le métabolisme (University of Pennsylvania School of Medicine) s’intéressent également à la relation entre le contrôle de l’horloge circadienne et les maladies métaboliques, comme l’obésité et le diabète. «Il existe une interaction dynamique entre les rythmes circadiens et le métabolisme. On ne mange pas lorsque l’on dort, et l’organisme doit en tenir compte. Nous nous intéressons au contrôle interne du métabolisme parce que le comportement alimentaire suit un cycle quotidien, et les activités hormonales qui le régulent sont circadiennes.»
Yin et coll., « Science », 17 février 2006, p. 1002.
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