LES MECANISMES moléculaires et cellulaires qui conduisent à la formation des métastases ne sont pas entièrement compris, mais un nombre croissant d'observations suggèrent que l'acquisition du phénotype métastatique par une cellule tumorale pourrait dépendre de signaux environnementaux. Les résultats d'une étude américaine aujourd'hui publiée dans la revue « Nature » plaident en faveur de cette hypothèse.
Karnoub et coll. y montrent en effet que les cellules souches mésenchymateuses présentes dans le stroma des tumeurs génèrent des signaux prométastatiques.
La présence d'un grand nombre de cellules souches mésenchymateuses dérivant de la moelle osseuse a récemment été détectée dans le stroma des tumeurs. La fonction de ces cellules restait à préciser, et Karnoub et coll. ont imaginé qu'elles pouvaient avoir un impact sur le développement des tumeurs.
Pour tester cette hypothèse, les chercheurs ont injecté à des souris un mélange de cellules souches mésenchymateuses, dérivant de moelle osseuse humaine, et de cellules tumorales, dérivant de cancer mammaire. Un groupe d'animaux témoins a uniquement reçu les cellules tumorales. Cette expérience a révélé que la présence de cellules souches mésenchymateuses favorise la formation de métastases. Les métastases détectées trois mois après le début de l'expérience sont en effet de deux à quatre fois plus nombreuses chez les souris qui ont reçu le mélange de cellules souches mésenchymateuses et de cellules tumorales.
Un contact rapproché avec les cellules tumorales.
Au cours d'une seconde série d'expériences, les cellules tumorales et les cellules souches mésenchymateuses ont été administrées aux animaux séparément, au niveau de sites distincts. Aucun effet des cellules mésenchymateuses n'a alors été observé. Ce résultat suggère que l'effet prométastatique des cellules souches mésenchymateuses nécessite un contact rapproché avec les cellules tumorales.
Par ailleurs, il est apparu que cet effet est réversible : les cellules métastatiques récupérées sur les souris de la première série d'expériences perdent leur caractère invasif et leur mobilité lorsqu'elles ne sont plus en présence des cellules souches mésenchymateuses.
Karnoub et coll. ont pu établir que l'effet des cellules souches mésenchymateuses sur les propriétés des cellules tumorales passe par l'action d'une chimiokine, la protéine CCL5. En présence de cellules tumorales, les cellules souches mésenchymateuses sécrètent d'importantes quantités de la chimiokine. Les molécules de CCL5 libérées se lient alors aux récepteurs CCR5 présents à la surface des cellules tumorales. Cette interaction entraîne l'activation de voies de signalisation qui provoquent une modification du phénotype des cellules tumorales. Elles deviennent aptes à former des métastases.
En bloquant cette cascade de réactions, par exemple en ciblant les récepteurs CCR5 à l'aide des molécules développées pour le traitement de l'infection par le VIH, il pourrait être possible d'inhiber la formation de métastase. Une piste à suivre…
Karnoub AE et coll. « Nature » du 4 octobre 2007, vol. 449, pp. 557-563.
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