CHRISTINE PETIT a identifié les gènes impliqués dans plusieurs types d'atteinte sensorielle, olfactive, visuelle et surtout auditive, et a décrypté les mécanismes cellulaires et moléculaires en cause. Ses travaux ont été notamment menés chez des familles malentendantes vivant dans des isolats géographiques en Tunisie, au Liban, en Iran et au Maroc, en collaboration avec les médecins et les chercheurs de ces pays. Elle est en effet partie de l'hypothèse d'une atteinte génique unique dans ces isolats.
Déjà distinguée par le prix Charles-Léopold-Meyer de l'Académie des sciences en 1999 et le prix Ernest-Jung pour la médecine en 2001, elle vient donc de recevoir le prix 2004 L'Oréal-Unesco pour les femmes et la science, « pour avoir élucidé les bases moléculaires et cellulaires de la surdité et d'autres déficits sensoriels héréditaires, chez l'homme ».
Quatre autres femmes ont également été récompensées par ce prix : Jennifer Thomson, de l'université du Cap, en Afrique du Sud, « pour le développement de plantes transgéniques résistantes aux infections virales, à la sécheresse et à d'autres risques » ; Lucia Mendonça Previato, de l'université fédérale de Rio de Janeiro, au Brésil, « pour avoir fait progresser la compréhension, le traitement et la prévention de la maladie de Chagas » ; Philippa Marrack, du Howard Hughes Medical Institute de Denver, aux Etats-Unis, « pour la caractérisation des fonctions des lymphocytes T dans l'immunité et pour la découverte des superantigènes » ; et, enfin, Nancy Ip, de l'université des sciences et des technologies de Hong Kong, « pour ses découvertes concernant le contrôle moléculaire de la croissance, de la différenciation et de la formation des synapses dans le système nerveux ».
Une inégalité persistante.
Ces prix mettent en avant des chercheuses des cinq continents et s'inscrivent dans une volonté commune de l'Unesco et de L'Oréal pour promouvoir l'implication active des femmes dans des champs d'investigation encore très masculins que sont les sciences de la vie et les sciences de la matière.
Comme on le sait, dans bon nombre de pays, les jeunes filles n'ont pas accès à l'éducation, ce sont elles qui sont les plus touchées par l'illettrisme et, même dans les pays industrialisés, elles s'engagent trop peu dans les filières scientifiques. Le déséquilibre entre hommes et femmes dans la recherche scientifique reste criant ; non seulement les femmes restent sous-représentées, mais celles qui réussissent bénéficient de moins de soutien que leurs collègues masculins. Leur rémunération est plus faible, et leur promotion, plus lente. Ainsi, selon un rapport de la Commission européenne, publié en 2003, bien que 40 % des scientifiques titulaires d'un doctorat soient des femmes, celles-ci ne représentent qu'un tiers des chercheurs des organismes publics et des universités, et seulement 15 % des chercheurs du secteur privé. En France, 32 % des chercheurs du service public sont des femmes, pourcentage qui tombe à 10 % dans le privé. Dans six Etats membres de l'Union européenne, moins de 7 % des professeurs de sciences sont des femmes. Si leur représentation est relativement marquée en biologie, elle l'est nettement moins en physique et encore moins dans le domaine de l'ingénierie.
Au-delà d'un souci de parité évident, la nécessité de réserver une plus grande place aux femmes dans les sciences tient au fait que, par leur vision du monde et de son développement, elles apportent une orientation différente à la recherche, explique Françoise Rivière, sous-directrice générale de l'Unesco.
Pour encourager de jeunes chercheuses à poursuivre leurs travaux, le programme L'Oréal-Unesco offre également des bourses à trois femmes de chacune des cinq régions suivantes : Afrique, Etats arabes, Asie-Pacifique, Europe-Amérique du Nord et Amérique latine-Caraïbes. L'attribution de ces bourses a également eu lieu au cours de cette semaine où les femmes sont à la une.
Présentations du Pr Christian de Duve, prix Nobel de médecine 1974 et président du jury des prix L'Oréal-Unesco, de Mme Françoise Rivière, sous-directrice générale de l'Unesco, et du Pr Françoise Dieterlen, directrice de recherche au Cnrs et présidente du comité de sélection. Site : www.forwomeninscience.com.
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