La prééclampsie a longtemps été considérée comme la « maladie des hypothèses ». Son mécanisme commence à être élucidé. Les critères d'hypertension de la grossesse, quant à eux, sont stricts.
LA PRÉECLAMPSIE n'est pas une pathologie dont le mécanisme physiopathologique est univoque. Il semble actuellement qu'elle doive en premier lieu être considérée comme un syndrome placentaire. Celui-ci est secondairement suivi d'un syndrome maternel. J. Maynard et S. A. Karumanchi ont montré que ce syndrome maternel s'explique par une dysfonction endothéliale généralisée secondaire à la surexpression d'un variant du récepteur du VEGF et du PIGF nommé sFlt1, pour « soluble fms-like tyrosine kinase 1 ». Ce variant est libéré par le placenta pathologique (1). Le sFlt1 inhibe fortement le VEGF et le PIGF, deux substances angiogéniques impliquées dans le développement de la grossesse. L'élévation du taux sérique de sFlt1 peut être détectée précocement, avant même l'apparition de tout stigmate clinique. Cela pourrait permettre l'identification des femmes à risque de prééclampsie chez les patientes ayant une HTA gestationnelle ou chronique (2).
Les troubles hypertensifs survenant en cours de grossesse restent une cause majeure de morbi-mortalité maternelle, foetale et néonatale (3). La terminologie actuellement retenue conduit à distinguer les grossesses au cours desquelles une protéinurie est constatée de celles ou elle ne l'est pas, ainsi qu'à distinguer le cas des femmes enceintes selon qu'elles étaient antérieurement hypertendues ou non. Ainsi, en l'absence de protéinurie, l'hypertension artérielle (HTA) préexistante ou chronique est distincte de l'HTA gestationnelle, qui est induite par la grossesse. En cas de protéinurie, la prééclampsie est qualifiée de surajoutée si elle survient chez une femme antérieurement hypertendue.
Schématiquement, l'hypertension concerne une femme enceinte sur dix, le plus souvent chez des femmes obèses, hypercholestérolémiques et/ou ayant des antécédents familiaux. Moins d'une femme sur cinq restera hypertendue à l'issue de la grossesse.
La mesure de la pression artérielle par la méthode auscultatoire est un élément essentiel du suivi d'une grossesse. Ses résultats sont en partie dépendants des conditions dans lesquelles l'examen est réalisé. Cette mesure doit être répétée, au repos et en position assise ou en décubitus latéral gauche. La pression artérielle seuil est de 140 mmHg pour la systolique et de 90 mmHg pour la diastolique. Une remontée tensionnelle en fin de grossesse, après un abaissement des chiffres pendant le deuxième trimestre, est habituellement constatée.
Une évaluation plus objective de la variabilité de la pression artérielle individuelle et du calcul du niveau tensionnel moyen par l'automesure et la mesure ambulatoire de la pression artérielle (MAPA) permet d'éviter les faux diagnostics d'hypertension qui pourraient conduire à des traitements abusifs. La MAPA permet d'analyser les variations nycthémérales de la pression artérielle (4). La valeur limite haute qui ne devrait pas être dépassée en cours de grossesse est définie par un niveau tensionnel de 127/82 mmHg au premier trimestre, de 127/83 mmHg au cours du deuxième trimestre et de 131/88 mmHg au cours du dernier trimestre.
Pour une évaluation objective.
Dans le cadre de la grossesse, l'automesure tensionnelle, quant à elle, permet la multiplication des mesures et le calcul de valeurs moyennes. Leur niveau tensionnel est alors généralement inférieur à celui qui est observé en milieu obstétrical. La facilité de sa mise en oeuvre, son acceptabilité et son innocuité en font un examen particulièrement intéressant. La possibilité de télétransmettre les résultats facilite, par ailleurs, le suivi des patientes. L'automesure peut être employée pour affirmer le diagnostic d'hypertension de la grossesse, quel que soit son terme, mais aussi pour en préciser le pronostic quand le diagnostic a été posé. La constatation d'une anomalie pourrait alors conduire à rechercher une prééclampsie, un retard de croissance intra-utérin ou une prématurité. L'automesure peut enfin permettre d'affiner l'adaptation thérapeutique, par exemple en mettant en évidence une hypotension iatrogène ou en modulant les prises thérapeutiques en fonction du cycle nycthéméral de la patiente. Des valeurs de référence ont pu être établies sans que l'on puisse pour autant parler de valeurs « normales » (5). Elles suggèrent des valeurs limites à ne pas dépasser, respectivement, de 118/73, 117/73 et 121/80 mm Hg pour chacun des trimestres de la grossesse.
D'après les communications d'Alexandre Hertig (Paris) et Thierry Denolle (Dinard). (1) Maynard SE et coll. J Clin Invest 2003; 111: 649-58. (2) Hertig A et coll. Clin Chem 2004; 50 (9): 1702-3.
(3) Mancia G et coll. 2007 guidelines for the management of arterial hypertension: the Task Force for the Management of Arterial Hypertension of the European Society of Hypertension (ESH) and of the European Society of Cardiology (ESC). J Hypertens 2007; 25: 1105-87.
(4) Contard S et coll. AJH 1993; 6: 880-4.
(5) Denolle T et coll. Am J Hypertens 2005; 18 (9 Pt 1): 1178-80.
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