POUR L'OMS, 90 % des cancers bronchopulmonaires peuvent se répartir en quatre groupes principaux : les cancers épidermoïdes, les adénocarcinomes, les cancers à petites cellules et les cancers à grandes cellules.
Responsables de 90 % de ces cancers, les carcinogènes du tabac induisent une mutagenèse diffuse responsable d'un processus de transformation maligne multifocale avec des lésions proximales ou périphériques souvent multiples, conformément au concept de champ de cancérisation.
Cancers épidermoïdes.
Les cancers épidermoïdes représentent 45 % des cancers bronchopulmonaires en Europe, avec cependant, depuis vingt ans, une diminution de leur incidence au profit des adénocarcinomes. Deux tiers d'entre eux se présentent comme des tumeurs centrales développées dans les bronches lobaires ou segmentaires, un tiers comme des tumeurs semi-distales d'apparence périphérique. Chez les fumeurs, ces carcinomes sont souvent précédés de lésions prénéoplasiques, dysplasies légères, modérées ou sévères selon qu'un tiers, deux tiers ou toute l'épaisseur de l'épithélium comporte des anomalies cytologiques. Stade ultime de la lésion prénéoplasique, le carcinome in situ se caractérise par la perte de tout aspect de différenciation ou de maturation.
Les carcinogènes mis en cause dans les cancers épidermoïdes ne sont pas différents de ceux impliqués dans la genèse des adénocarcinomes ou des carcinomes à petites cellules, non plus que les mutations des gènes clés qui assurent les fonctions de contrôle de la prolifération et de l'apoptose.
Carcinomes à petites cellules.
Les carcinomes à petites cellules comptent pour 25 % des cancers pulmonaires. Les deux tiers sont proximaux et se présentent comme une tumeur péribronchique qui envahit les ganglions lymphatiques dans la majorité des cas. Moins de 5 % se présentent comme une lésion solitaire.
Deux types de carcinomes sont reconnus - purs et composites - qui ne semblent pas se comporter différemment tant sur le plan du pronostic que de celui de la réponse à la chimiothérapie. Bien que 95 % des patients atteints soient fumeurs, les états prénéoplasiques ne sont pas identifiés.
Adénocarcinomes.
Les adénocarcinomes comptent pour 30 % des cancers bronchopulmonaires en Europe. La plupart des adénocarcinomes pulmonaires primitifs sont hétérogènes et consistent en une association de différents sous-types histologiques, ce qui justifie l'addition d'un sous-type mixte à la classification (80 % des cas). Les carcinomes bronchioloalvéolaires, quant à eux, sont actuellement restreints aux cas où les cellules malignes en couche monocellulaire s'adossent à des parois alvéolaires conservées et on peut les considérer comme non invasifs.
Cette redéfinition restrictive des carcinomes bronchioloalvéolaires nécessite une réévaluation complète de la littérature les concernant : ainsi définis, en effet, ces carcinomes n'excèdent pas 3 % des tumeurs pulmonaires. L'absence de caractère invasif est considérée comme un critère essentiel dans la mesure où les tumeurs de moins de 3 cm sont curables par une segmentectomie et que les patients dont le carcinome bronchioloalvéolaire présente une zone de fibrose dense centrale invasive de moins de 5 mm bénéficient également de 100 % de survie à cinq ans.
Une lésion prénéoplasique a été nouvellement décrite pour les adénocarcinomes périphériques : l'hyperplasie atypique adénomateuse. Cette lésion millimétrique ressemble à un carcinome bronchioloalvéolaire de petite taille mais n'en a pas les caractéristiques cellulaires. Elle est cependant considérée comme une lésion préinvasive car elle porte les mêmes lésions moléculaires que les adénocarcinomes.
Carcinomes à grandes cellules.
Le diagnostic histologique de carcinome pulmonaire à grandes cellules est un diagnostic d'élimination pour un cancer qui ne présente ni différentiation épidermoïde, ni différentiation glandulaire, ni critères cytologiques de carcinome à petites cellules. Cette tumeur peu différenciée peut être périphérique ou centrale. Parmi les 5 variantes possibles, le carcinome neuroendocrine à grandes cellules et le carcinome basaloïde méritent mention pour leur signification pronostique.
Le carcinome neuroendocrine à grandes cellules survient typiquement chez les fumeurs et son pronostic est sombre : 27 % de survie à cinq ans et 11 % à dix ans. Son architecture évoque une différentiation neuroendocrine mais un compte de mitoses > 10/2 mm2 est exigé pour écarter le diagnostic de tumeur carcinoïde atypique, dont le pronostic est bien meilleur. Par ailleurs, 10 % des carcinomes non à petites cellules présentent des marqueurs immunohistochimiques neuroendocrines en microscopie électronique mais sans morphologie neuroendocrine. Leur signification clinique et leur chimiosensibilité n'ayant pas été prouvées à grande échelle, ils ne sont pas reconnus comme entité spécifique par l'OMS.
Les carcinomes basaloïdes représentent de 3 à 4 % des cancers non à petites cellules en Europe et surviennent toujours chez l'homme. Ils se développent dans les bronches proximales mais deux tiers des cas présentent des carcinomes in situ latéraux ou à distance. La moitié des tumeurs sont mixtes, associées à un carcinome épidermoïde, et font partie des carcinomes épidermoïdes de la variante basaloïde.
D'après un entretien avec le Pr Elisabeth Brambilla, département d'anatomie et cytologie pathologique, CHU Albert-Michallon, Grenoble.
Les répercussions pratiques
Le changement majeur de cette classification concerne les adénocarcinomes bronchioloalvéolaires dont la définition restrictive de tumeur non invasive présente un long délai d'acceptation ou d'intégration par les anatomopathologistes. Le carcinome bronchioloalvéolaire avait en effet reçu plusieurs définitions au cours des 50 dernières années. Sa définition actuelle exclue l'invasion stromale représentée le plus souvent par une zone de fibrose desmoplastique centrale évaluée par des cellules tumorales. Sur la base d'études toutes issues du Japon, les carcinomes bronchioloalvéolaires « micro-invasifs » avec plus de 75 % de croissance non invasive le long des parois alvéolaires, et moins de 5 mm de fibrose invasive centrale bénéficieraient de la même survie de 100 % à cinq ans. L'entité évoluera donc si l'on peut confirmer les résultats des séries japonaises dans les séries européennes et américaines. Une autre implication très importante de l'entité est la récente découverte de mutation de l'EGF-R dans les adénocarcinomes mixtes avec contingent bronchioloalvéolaire (dits « bronchioloalvéolaires » dans la terminologie inclusive précédente) qui corrèlent à 90 % avec la réponse à un inhibiteur de l'activité tyrosine kinase du récepteur à l'EGF, le gefinitib (Iressa) : les carcinomes bronchioloalvéolaires définis par l'OMS 2004 répondent-ils ? De quelle taille est le contingent bronchioloalvéolaire dans les adénocarcinomes mixtes qui répondent à ce médicament ? Questions à suivre !
> Pr ELISABETH BRAMBILLA
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