UNE INCONTINENCE urinaire postopératoire survient chez 5 à 30 % des patients après une prostatectomie radicale, moins souvent après une résection endo-urétrale. Les symptômes s'améliorent pendant l'année qui suit l'intervention, mais après un an, malgré la rééducation, environ 10 % des patients conservent une incontinence. Cette dernière est majeure une fois sur dix (grade 3 = incontinence totale) et modérée neuf fois sur dix (grade 1 = une garniture par jour et grade 2 = deux à trois garnitures par jour). L'incontinence urinaire même modérée est un handicap qui entraîne une forte altération de la qualité de vie. Dans les cas d'incontinence sévère, le traitement standard est le sphincter artificiel. Mais cette approche est disproportionnée pour la prise en charge de l'incontinence modérée. Les options thérapeutiques envisageables étaient donc l'abstention thérapeutique et l'utilisation de garnitures, ou les injections endo-urétrales de substances amorphes comme le collagène ou le macroplastique dont les résultats étaient décevants (dégradation au fil du temps).
Un procédé récent.
Un nouveau procédé a été décrit en 2002 par C. Comiter (1). Il s'agit d'un implant de soutènement urétral. Le dispositif est composé d'une plaque synthétique multiperforée en polyester enduit de silicone, mesurant 4 cm sur 7, et de six vis en titane qui sont munies de fils de suture. Ces vis permettent la fixation de la plaque aux os de la région pelvienne à l'aide d'un tournevis à usage unique. L'ensemble permet d'assurer le soutènement et la compression de l'urètre bulbaire par cette plaque non résorbable.
L'expérience acquise avec ce dispositif à l'hôpital Edouard-Herriot de Lyon, initialement rapportée sur 22 patients en 2004 (2), porte actuellement sur 50 malades. Dans 49 cas, l'incontinence était consécutive à une prostatectomie radicale, et elle était post-traumatique chez un patient. Chez 40 sujets sur 50, l'incontinence était de grade 1 ou 2.
L'intervention a été réalisée sous anesthésie générale ou rachianesthésie, sous couvert d'une antibioprophylaxie. La plaque a été positionnée pour comprimer l'urètre sur une hauteur de 4 centimètres. Les patients ont été revus à un mois, puis tous les trois mois. Le suivi a porté sur la continence, le flux urinaire maximal, le résidu postmictionnel, le score Ipss (International Prostate Symptom Score) et l'appréciation de la qualité de vie grâce à une échelle visuelle analogique (EVA).
90 % de succès dans les grades 1.
La durée du suivi a été de 8,5 mois en moyenne, avec des extrêmes de 1 et 22 mois. Le taux de succès de l'intervention a été de 76 %, 25 patients étant secs et 13 étant améliorés. Parmi les 23 patients dont le suivi a porté sur une période supérieure à 12 mois, le taux de succès a été de 66 %. En fonction du niveau de l'incontinence, les résultats de l'implantation du dispositif ont été très variables. En effet, le succès a été de 90 % en cas d'incontinence de grade 1 et de 76 % en cas d'incontinence de grade 2. Par ailleurs, 8 patients avaient reçu une irradiation pelvienne. Dans ce sous-groupe de sujets, 6 sont restés incontinents, soit 75 %.
Les douleurs périnéales ont, en règle générale, régressé dans les trois mois qui ont suivi l'intervention. Elles ont toutefois persisté chez 6 patients, (soit 12 %) et ont alors nécessité une prise en charge spécifique. Finalement seul un patient sur 50 a gardé des douleurs résiduelles. Une infection de la bandelette est survenue chez 3 patients (dont un sujet immunodéprimé) nécessitant une explantation.
En cas d'échec du traitement par cet implant de soutènement, une deuxième tentative reste possible, de même que la mise en place d'un sphincter artificiel.
En conclusion, la mise en place d'une plaque de soutènement urétral, conformément au modèle initialement décrit par C. Comiter, apparaît comme une technique mini-invasive dont l'apprentissage est facile. Elle implique un sondage de courte durée et une hospitalisation brève. Les mictions spontanées sont obtenues sans manipulation. L'indication de choix pour cette technique prometteuse est ainsi l'incontinence faible à modérée après chirurgie prostatique. L'incontinence sévère et les antécédents de radiothérapie, en revanche, sont des critères prédictifs d'échec. Enfin, la mise en place d'un sphincter artificiel reste possible, si besoin.
* Hôpital Edouard-Herriot, Lyon.
1. Comiter CV. The Male Sling for Stress Urinary Incontinence : a Prospective Study. J Urol 2002 ; 167 (2 Pt 1) : 597-601.
2. Fassi-Fehri H, et coll. Traitement de l'incontinence urinaire postopératoire de l'homme par la prothèse Invance : résultats préliminaires. Prog Urol 2004 ; 14 (6) : 1171-6.
Le ballon ajustable Uromédica
Le ballon Uromédica est une autre possibilité thérapeutique aujourd'hui disponible dans l'incontinence urinaire postprostatectomie, en particulier chez les patients ayant des fuites modérées qui ne sont pas (encore) candidats à la mise en place d'un sphincter artificiel. L'intervention consiste à implanter par voie percutanée, sous anesthésie générale, un ballon en silicone à gauche et à droite de l'urètre, en quelque sorte, de façon à recréer une prostate. L'avantage majeur de ce dispositif est qu'il est ajustable en ambulatoire : on peut en effet regonfler ou dégonfler le ballon jusqu'à obtenir la compression de l'urètre « idéale » pour le patient. Les résultats d'une étude française multicentrique prospective portant sur une trentaine de malades viennent d'être présentés lors du dernier congrès français d'urologie : les deux tiers des patients récupèrent une continence après cette intervention qui réclame seulement deux ou trois jours d'hospitalisation ; en cas d'infection, il est facile de changer le ballon sous anesthésie locale. De 10 à 15 % es malades ne répondent cependant pas à la technique, pour des raisons encore mal connues, de même que les patients irradiés. En attendant le remboursement du dispositif, une vingtaine de centres en France recourent à cette technique, dont celui de la Pitié-Salpêtrière (Paris), dans lequel a été opérée la plus grande série de malades.
>>>D'après un entretien avec le Dr Emmanuel Chartier-Kastler,cCentre hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.
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