Une atteinte pulmonaire peut être associée à une dermatose spécifique, comme la sclérodermie, la dermatomyosite, la polychondrite atrophiante, le syndrome de Mac-Duffie, les lymphopapulomatoses angiocentriques et les syndromes paranéoplasiques.
LA SCLERODERMIE systémique est une pathologie qui concerne environ 6 000 patients en France. Son début est aigu. La survie à cinq ans dépend de l’étendue des lésions cutanées. Elle est de l’ordre de 85 % en cas de sclérodactylie, de 75 % lorsque les articulations métacarpophalangiennes sont concernées, et de 50 % seulement en cas d’atteinte du tronc. L’atteinte viscérale la plus fréquente est celle du tractus gastro-intestinal, dans 87 % des cas. Elle s’exprime cliniquement en règle générale par un reflux gastro-oesophagien.
Htap et sclérodermie, une survie de douze mois après le diagnostic.
Mais l’atteinte pulmonaire est également en première ligne, puisqu’elle concerne environ 65 % des patients. Elle constitue la première cause de mortalité. La pneumopathie interstitielle chronique fibrosante en est la forme la plus fréquente. Elle est volontiers tardive et asymptomatique. Elle est aggravée par le reflux gastro-oesophagien. Son diagnostic est fondé sur le scanner et les épreuves fonctionnelles respiratoires avec mesure de la capacité de diffusion pulmonaire du monoxyde de carbone.
Au cours de la sclérodermie, la prévalence de l’hypertension artérielle pulmonaire (Htap) est de l’ordre de 10 %. Une Htap isolée est constatée après dix ans d’évolution des formes modérées de la maladie. Au cours du Crest Syndrome, qui associe calcinose, phénomène de Raynaud, atteinte oesophagienne, sclérodactylie et télangiectasies, une hypertension artérielle pulmonaire isolée est associée dans 30 % des cas, et une Htap secondaire est observée chez 24 % des patients. Ainsi, toute dyspnée chez un patient ayant un syndrome Crest devrait faire rechercher une hypertension artérielle pulmonaire.
En l’absence de marqueur sensible ou spécifique de cette atteinte, une échocardiographie-Doppler devrait faire partie du bilan initial et devrait être ensuite pratiquée tous les ans. Des épreuves fonctionnelles avec mesure de la capacité de diffusion pulmonaire du monoxyde de carbone doivent ensuite être pratiquées au moindre doute. Le risque d’hypertension artérielle pulmonaire est doublé lorsque le diagnostic de sclérodermie est posé après l’âge de 60 ans. La survie moyenne après le diagnostic est de douze mois, et la survie à cinq ans n’est que de 7 % en cas d’Htap diagnostiquée et surveillée, contre 90 % en cas de sclérodermie sans Htap.
Le traitement spécifique de cette atteinte artérielle pulmonaire fait appel à un antagoniste non spécifique des récepteurs de l’endothéline, le bosentan. Son emploi nécessite la surveillance des fonctions hépatiques en raison du risque de cytolyse. L’époprosténol en perfusion centrale et l’iloprost en aérosol complètent l’arsenal thérapeutique.
Dans la dermatomyosite, la biopsie des nécroses digitales aurait pour intérêt de rechercher une microangiopathie oblitérante avec dépôts fibrinoïdes, considérée comme un marqueur de l’atteinte pulmonaire. Le syndrome des anti-synthétases est un sous-groupe de myosites comportant un phénomène de Raynaud, une polyarthrite, une pneumopathie interstitielle et des anticorps synthétases, dont le plus fréquent est l’anti-JO-1.
De 5 à 9 % des patients atteints de dermatomyosite.
Des associations ont été décrites avec le syndrome de Gougerot-Sjögren, le lupus, la sclérodermie, la polyarthrite rhumatoïde ou le syndrome de Sharp. Le pronostic, grave et conditionné par l’atteinte pulmonaire, justifie la corticothérapie à forte dose.
D’une manière générale, une pneumopathie interstitielle est observée dans 5 à 9 % des cas de dermatomyosite. Elle peut être révélatrice, mais peut également être asymptomatique. La pneumopathie d’inhalation, quant à elle, conditionne le pronostic. Une hypoventilation alvéolaire est enfin possible, par atteinte des muscles respiratoires.
La polychondrite atrophiante est une connectivite caractérisée par une chondrite des oreilles, souvent révélatrice. Elle peut atteindre le nez et le larynx. Elle peut être suivie d’une atrophie définitive. Parmi les nombreuses manifestations systémiques, l’atteinte dermatologique, notamment des nodules inflammatoires des membres ou un Magic Syndrome (Mouth And Genital Ulcers with Inflamed Cartilage), concerne 35 % des patients.
La polychondrite peut atteindre le cartilage trachéo-bronchique, ce qui est à rechercher par un scanner.
Au cours du syndrome de Mac-Duffie, une entité fortement discutée qui associe une vascularite urticarienne à une hypocomplémentémie, l’atteinte pulmonaire est fréquente, tout comme l’atteinte oculaire. Dans la granulomatose lymphomatoïde de Liebow, une pathologie lymphoproliférative angiocentrique, l’atteinte cutanée existe dans 10 à 45 % des cas. L’atteinte pulmonaire (nodules ou lésions) conditionne le pronostic, avec une survie médiane inférieure à deux ans. Dans le pemphigus paranéoplasique, enfin, une étude récente a souligné la gravité de l’atteinte respiratoire. Parmi les autres syndromes paranéoplasiques, l’acrokératose de Bazex est associée à un carcinome épidermoïde des voies aérodigestives supérieures. L’Erythema gyratum repens est fréquemment associé à un cancer broncho-pulmonaire. Au cours de l’hypertrichose lanugineuse acquise, le cancer le plus fréquemment associé est celui du poumon. Dans le syndrome des ongles jaunes, l’atteinte unguéale est associée à un lymphoedème primitif et à des manifestations broncho-pulmonaires diverses. Au cours des dermatoses neutrophiliques, enfin, l’atteinte pulmonaire peut être concomitante, la précéder ou lui succéder.
D’après la communication du Pr Philippe Modiano, centre hospitalier Saint-Philibert, université catholique de Lille.
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