LES ETUDES de jumeaux et de familles suggèrent que l'autisme est génétiquement déterminé. Des facteurs génétiques, peut-être interagissant avec des facteurs environnementaux, contribueraient à l'autisme en affectant le développement et le fonctionnement du cerveau.
A ce jour, environ 10 % des cas d'autisme sont liés à des syndromes monogéniques et à des anomalies chromosomiques, telles que syndrome de l'X fragile, sclérose tubéreuse, syndrome de Ret, et duplications héréditaires du chromosome 15q11-13 (syndromes de Prader-Willi et Angelman).
Les études génétiques n'ont pas encore réussi à éclairer les autres cas d'autisme (90 %), dits idiopathiques. De récentes études du génome ont mis en évidence un excès de variations du nombre de copies d'ADN, résultant de mutations de novo, chez les enfants atteints d'autisme sporadique. Ces études n'ont pas réussi pour autant à identifier une variation récurrente spécifique.
Détecter des délétions ou duplications.
Un consortium international de chercheurs, dirigé par le Dr Mark Daly, du Massachusetts General Hospital (Boston), a donc cherché à identifier des variations du nombre de copies d'ADN associées à l'autisme.
A cette fin, ils ont étudié le génome des membres, autistes et non autistes, de 751 familles multiplexes (1 441 autistes) de la série AGRE (Autism Genetic Resource Exchange). Ils ont utilisé une puce à ADN (plate-forme Affymetrix de SNP variants et non variants) qui permet de détecter des délétions ou des duplications dans le génome.
Les mutations de novo qu'ils ont identifiées ont ensuite été testées dans une étude de réplication chez 512 enfants adressés à un hôpital de Boston pour retard du développement, retard mental ou suspicion de trouble autistique (sujets cas), ainsi que dans une vaste population islandaise (18 834 témoins).
Les résultats identifient une association entre une microdélétion sur le bras court du chromosome 16 (et la duplication réciproque transmise) et l'autisme.
Cette région 16p11.2 correspond à l'une des 150 régions du génome humain prévues pour être un point chaud (ou «hot spot») de délétion ou de duplication récurrente.
De façon plus précise, ils ont observé parmi les familles AGRE, 5 cas de délétion de novo (ou spontanée) d'environ 500 kilobases sur le chromosome 16p11.2.
La même délétion a été retrouvée chez 5 des 512 enfants de l'hôpital de Boston (1 % des sujets cas), chez 3 des 299 autistes d'une cohorte islandaise (1 % des sujets cas), mais chez seulement 2 des 18 834 témoins islandais (moins de 0,01 % de la population) sans signe d'autisme.
La duplication réciproque de cette région a été observée chez 7 autistes de 3 familles AGRE. Cette mutation était héritée chez 6 autistes, de 2 familles : transmise d'un parent à deux de ses deux enfants atteints (garçon et fille) et à une fille non touchée et d'un autre parent à 4 de ses 4 fils atteints.
Dans la troisième famille, la duplication semble avoir été une mutation de novo. Cette duplication a également été observée chez 4 des 512 enfants de l'hôpital de Boston.
Les manifestations et la sévérité de l'autisme sont variables parmi les 24 patients porteurs des délétions ou des duplications du chromosome 16.
«Nos données indiquent que la région du chromosome 16p11.2 influence la susceptibilité à l'autisme lorsqu'elle est délétée ou dupliquée», concluent les chercheurs.
Cette région du chromosome 16 contient environ 25 gènes et le prochain objectif des chercheurs sera de déterminer lequel ou quels gènes dans cette région contribuent à prédisposer à l'autisme.
Il est important de noter que cette découverte a été confirmée dans une étude indépendante du Dr Steve Scherer, de l'hôpital des Enfants-Malades à Toronto (à paraître dans l'« American Journal of Human Genetics »).
En outre, Daly et coll. n'ont pas détecté d'autre délétion ou duplication récurrente liée à l'autisme, hormis la duplication du chromosome 15q11-13 déjà signalée.
La partie émergée de l'iceberg.
Dans un éditorial, les Drs Evan Eichler (University of Washington) et Andrew Zimmerman (Johns Hopkins) suggèrent que les variations du nombre de copies des régions 16p11.2 et 15q11-13, qui expliquent environ 2 à 3 % des cas d'autisme, pourraient ne représenter que la partie émergée de l'iceberg.
De meilleures techniques génomiques et de plus vastes collections d'échantillons d'ADN de patients autistes pourraient peut-être permettre de découvrir que des variations du nombre de copies dans d'autres « hot spots » génétiques sont également significativement associées à l'autisme.
« New England Journal of Medicine », 14 février 2008, Weiss et coll., pp. 667 et 737 ; publication en ligne le 9 janvier 2008.
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