Conformément au principe d'un « droit à compensation », affirmé dans la loi du 4 mars 2002 - dite « anti-arrêt Perruche », qui interdit toute indemnisation pour le seul fait d'être né (handicapé) -, et dont la mise en uvre relève de la « solidarité nationale », les sénateurs Nicolas About*, des Yvelines, et Paul Blanc*, des Pyrénées-Orientales, ont présenté une proposition de loi créant une allocation compensatrice individualisée (ACI).
Elle s'adresse aux personnes affligées d'un taux d'invalidité de 80 % et plus, reconnu par les commissions d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP), comme c'est le cas de l'actuelle allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP). Mais elle s'en différencierait par sa portée. L'ACTP est versée par les départements à quelque cent mille personnes qui ont besoin d'une aide constante pour accomplir les gestes de la vie quotidienne. Elles disposent d'un auxiliaire de vie 3 heures par jour, « ce qui est très insuffisant pour un myopathe », par exemple, soulignent les deux parlementaires.
14 heures d'auxiliaire de vie
par jour
Avec l'ACI, ce seraient entre 2,3 et 2,4 millions de Français présentant un taux de handicap de 80 % et plus qui bénéficieraient chacun, en moyenne, de 14 heures par jour d'auxiliaire de vie. Si l'on considère les seuls prestataires de l'ACTP qui ont besoin d'une assistance continue, le coût de l'ACI est évalué à 1,2 milliard d'euros sur un montant global de 15 milliards d'euros.
L'ACI, attribuée en fonction d'un projet de vie (vie seule ou à deux, avec ou sans travail, etc.), comprendrait deux volets. L'un offre un nombre d'heures d'auxiliaire de vie susceptible d'atteindre 24 heures sur 24 selon les besoins, et l'autre, un capital pour financer des surcoûts liés au handicap (logement ou voiture aménagés, aides techniques...).
Destinée à rendre la personne plus autonome à son domicile, l'ACI serait gérée par l'agence départementale du handicap. Ce guichet unique regroupe les compétences des COTOREP, des comités départementaux d'éducation spéciale et des Sstes pour la vie autonome.
Une participation financière serait demandée à chaque allocataire. Elle n'excéderait pas 10 % de ses ressources mensuelles non professionnelles et le quart des dépenses constituées par l'allocation. Outre l'Etat, financeur principal, les communes seraient appelées à couvrir 10 % des ACI allouées à leurs administrés, et les conseils généraux, 20 %. Dans le cas des départements, les sommes versées correspondent, d'après les prévisions, aux frais occasionnés par l'ACTP. L'Etat, de son côté, trouverait une source de financement par la suppression de l'allocation adulte handicapée (575 euros par mois), ce qui dégagerait des fonds pour les bénéficiaires de l'ACI. Sans compter le RMI qui va basculer sur les départements, comme le prévoit un projet de loi en cours de discussion au Parlement.
Un statut
pour les auxiliaires d'intégration scolaire
La proposition de loi About-Blanc concerne aussi l'accessibilité du cadre de vie, l'intégration scolaire et la représentativité des personnes handicapées dans les instances qui les concernent.
Les sénateurs proposent de mettre fin à un certain nombre de dérogations préfectorales en matière d'accessibilité des bâtiments accueillant du public, et ce sans exception dans le neuf, sous peine d'astreintes journalières. Dans l'ancien, les travaux de rénovation doivent être l'occasion d'une mise aux normes, là encore, sous peine d'amendes. Et si, dans dix ans, des musées, des hôpitaux et autres lieux collectifs ne sont pas accessibles, ils verseraient une contribution au Fonds d'accessibilité, au même titre que les transports publics qui ne seraient pas aux normes dans les cinq ans.
Les 1 800 auxiliaires d'intégration scolaire financés par l'Etat et les 3 000 autres qui dépendent du secteur associatif, tous sous contrat emploi-jeune, auraient un statut législatif sur une base associative. Dans le même temps, « l'obligation éducative » des enfants handicapés deviendrait une « obligation de scolarisation ». L'Education nationale doit fournir des enseignants, préparés à la scolarisation des handicapés dans le cadre de leur formation initiale, aux « établissements d'éducation spéciale ». Enfin, la proposition de loi suggère de promouvoir des associations tournées vers la défense des droits des handicapés. Il s'agit de permettre aux accidentés de la vie d'être effectivement représentés dans leurs instances nationales ou locales.
Le texte des Drs Nicolas About et Paul Blanc se présente comme une contribution à la réflexion en cours et vise à faire réagir le mouvement associatif. En aucune façon, il ne s'agit d'un texte concurrent du projet de loi de programmation et d'orientation en faveur des handicapés (réformant la loi du 30 juin 1975), qui sera présenté en conseil des ministres avant l'été, en vue d'un examen au Parlement à l'automne et d'une adoption définitive en juin 2004. Le gouvernement, d'ailleurs, réfléchit sur « un même type de système que l'ACI », reconnaissent les deux sénateurs de la majorité.
* Nicolas About est président de la commission des Affaires sociales du Sénat, et Paul Blanc, l'auteur d'un rapport sur la compensation du handicap (26 juillet 2002).
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature