Le système FreeStyle
Libre offre non seulement de grands services aux patients mais aussi aux diabétologues. Nous sommes tous confrontés lors de nombreuses consultations à des patients qui arrivent sans carnet (papier ou informatique), voire sans autre notion de l’équilibre glycémique que l’HbA1c, celle-ci n’étant même pas toujours disponible. Les valeurs mesurées par le système FreeStyle Libre restent disponibles dans le lecteur pendant 3 mois. Il suffit de scanner le capteur toutes les 8 heures au minimum. Surtout, elles peuvent être visualisées de façon simple et nette en téléchargeant les données sur un ordinateur, qu’il s’agisse d’un PC ou d’un Mac. Avec une valeur de glycémie toutes les minutes pendant 14 jours (soit plus de 20 000 valeurs) et la visualisation des tendances sur un « profil glycémique ambulatoire », les modifications des doses d’insuline injectées au stylo, des débits de base, et/ou des paramètres de l’aide au bolus de la pompe, deviennent beaucoup plus faciles : certains patients changent spontanément leurs débits de base et/ou leurs bolus au vu des résultats.
Estimation HbA1c
À partir des valeurs enregistrées par le système, le logiciel calcule aussi une valeur d’HbA1c estimée. Personnellement, la valeur (estimée sur 3 semaines de port de capteur) était exactement la même que celle mesurée au laboratoire à la même période : de façon impressionnante, il n’y avait même pas 0,1 % de différence ! L’HbA1c a deux buts : celui d’estimer l’équilibre glycémique avec une moyenne glycémique estimée sur 2 à 3 mois et celui de décider une éventuelle modification du traitement en fonction du résultat.
Le système FreeStyle Libre permet de visualiser directement l’équilibre glycémique avec, contrairement à l’HbA1c, la visualisation des hypoglycémies et des périodes où l’hyperglycémie est la plus importante. Avec un système aussi performant, on pourrait tout à fait imaginer, à terme, pouvoir se passer de dosages d’HbA1c de laboratoire pour ces patients, en rappelant quand même que les patients diabétiques sont en très grande majorité (à environ 90 %) diabétiques de type 2 et que la plupart d’entre eux ne relèvent pas de ce système.
Un coût qui pourrait être pris en charge
Cette notion doit également être rappelée aux payeurs des caisses d’Assurance-maladie. Un des freins importants à l’acquisition de ce système est actuellement son coût, non pris en charge. Le matériel, disponible uniquement en vente en ligne sur le site du fabricant, est composé du lecteur, qui coûte 59,90 €, et de capteurs, à 59,90 € l’unité (soit environ 4,3 € / jour, hors prix du lecteur). C’est à la fois peu et beaucoup.
Cela parait cher et rédhibitoire pour certains patients (mais pas toujours pour ceux auxquels on pense…). Mais pour les caisses d’Assurance-maladie, un capteur représente finalement le tarif de 130 mesures de glycémies capillaires à 0,46 € par mesure (1 bandelette = 0,38 € + 1 lancette avec autopiqueur =˜ 0,08 €), soit un peu plus de 9 glycémies par jour – et peut être encore moins si l’on considère un recours moindre aux dosages d’HbA1c.
La pratique de 7 à 9 glycémies par jour, voire davantage, est plus que fréquente pour beaucoup de personnes DT1 qui se prennent correctement en charge : une mesure avant et 2 heures après chaque repas et une mesure au coucher représentent déjà 7 tests par jour, auxquels il faut ajouter les mesures supplémentaires en cas d’hyperglycémie avec rajout d’insuline, ou d’hypoglycémie, avant de prendre le volant, avant et/ou après une activité physique… Pour de tels patients, le remboursement de ce dispositif serait donc, a priori, largement rentabilisé, sans compter les autres bénéfices évoqués ci-dessus.
Et dans un monde idéal (on a le droit de rêver !), la prise en charge ne devrait pas être réservée seulement à ceux dont l’équilibre n’est pas satisfaisant mais surtout à tous ceux qui contrôlent leur glycémie de multiples fois par jour et sont prêts à retirer le maximum de bénéfices du système.
En fait, lorsque vous demandez à une personne DT1 ce qui l’ennuie le plus au quotidien, les réponses les plus fréquentes en pratique quotidienne sont les hypoglycémies et la mesure de la glycémie capillaire. La tenue du carnet n’est généralement même pas citée par les adolescents et les jeunes adultes tant elle paraît préhistorique, même si le développement d’applications pour smartphones a un peu modifié cela.
On peut donc à présent disposer d’un système permettant probablement de diminuer le risque d’hypoglycémie s’il est utilisé correctement (c’est-à-dire consulté fréquemment), qui dispense de la tenue d’un carnet tout en donnant une quantité irremplaçable de renseignements au patient et au diabétologue, et qui permet probablement à terme d’améliorer l’équilibre s’il est bien utilisé en modifiant les doses d’insuline et en limitant la sous-correction volontaire par le patient dans la crainte des hypoglycémies. Sans parler de la tranquillité d’esprit, qui ne peut pas se chiffrer… Espérons que 2015 verra la possibilité d’étendre l’utilisation de ce système et de faciliter la vie des patients DT1 dans l’attente de la boucle (semi-)fermée.
Endocrino-diabétologue. Point Médical, Dijon.
Cet article a été réalisé en totale indépendance, en particulier d’Abbott. L’autrice est ou a été consultante/rédactrice/oratrice pour Animas, Lifescan, Lilly, Medtronic, Novo-Nordisk, Sanofi et VitalAire.
(1) https ://www.freestylelibre.fr
exergue
Dans un monde idéal, la prise en charge devrait concerner tous ceux qui sont prêts à retirer le maximum de bénéfices du système
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