PAR LE Dr JACQUES LALOUM*
ON A LONGTEMPS diagnostiqué et suivi le glaucome sur deux conséquences de l’atteinte des fibres visuelles : l’une, fonctionnelle, les troubles du champ visuel, et l’autre, anatomique, l’altération de la tête du nerf optique, lieu où commence l’atteinte. Mais l’involution des fibres visuelles elles-mêmes, si elle pouvait parfois être dépistée par les clichés anérythres, échappait à toute mesure. Grâce aux analyseurs de fibres, nous pouvons désormais quantifier précisément des atteintes, même débutantes. Cette approche complète utilement les examens de la papille et du champ visuel pour deux raisons : l’anomalie des fibres peut précéder l’atteinte du champ visuel, tardive, en raison de la redondance des fibres visuelles, et peut précéder le diagnostic d’anomalie papillaire, car la variabilité intersujets de la disposition anatomique rétinienne des fibres est faible.
Les principes du GDx.
Le GDx Vcc (Carl Zeiss Meditec) repose sur un calcul de déphasage d’une lumière laser polarisée éclairant les fibres péripapillaires : la composante de la lumière, dont l’orientation est perpendiculaire à celle des microtubules contenus dans les fibres visuelles, est retardée par rapport à la composante de la lumière, dont l’orientation est parallèle aux microtubules, et ce retard augmente avec l’épaisseur des fibres. (On appelle biréfringence la propriété optique des microtubules des fibres visuelles, liée à leur disposition parallèle.) Le calcul de ce retard permet d’évaluer l’épaisseur des fibres visuelles péripapillaires.
Les dioptres cornéens et cristalliniens présentant une biréfringence variable, un calcul préalable de cette perturbation est effectué. Il nécessite la fixation maculaire. L’examen est rapide, se fait sans dilatation, et dépend peu de la collaboration du patient.
Le résultat imprimé montre, pour chaque oeil, trois images, une courbe et un tableau de paramètres (Cf. figure).
La première image est une image de réflectivité. Elle ressemble à un fond d’oeil et doit être nette et uniformément éclairée. On vérifie sur cette image le centrage sur la papille d’un anneau de calcul où figure la courbe d’épaisseur des fibres.
Une carte d’épaisseur montre, pixel par pixel, l’épaisseur des fibres péripapillaires, avec un code de couleurs plus ou moins chaudes. On distingue normalement des faisceaux verticaux épais (jaunes et rouges) et des faisceaux horizontaux minces (bleus).
La carte de déviation où l’épaisseur moyenne de 32 x 32 carrés (chaque carré regroupe 16 pixels pour lisser la variabilité anatomique) est comparée à une base normative. La couleur du carré indique une probabilité d’atteinte (comme sur les schémas de déviation des champs visuels).
La courbe TSNIT, courbe d’épaisseur des fibres, calculée sur l’anneau, est déroulée à partir de la partie temporale : temporal, supérieur, nasal, inférieur, temporal. Cette courbe s’inscrit dans une bande limitée par les valeurs normales à 95 % et montre un profil en double bosse (qui correspond aux deux faisceaux verticaux). Elle permet le calcul de plusieurs paramètres, en particulier un paramètre de symétrie entre les deux yeux.
Une bonne reproductibilité.
Une base normative a permis d’établir différents paramètres statistiques pour quantifier l’importance de l’atteinte. Le plus discriminant est le Nerve Fiber Indicator, indice calculé sur l’ensemble des données qui exprime de façon directe le risque d’atteinte glaucomateuse (1).
L’examen par le GDx a fait preuve d’une bonne reproductibilité (2) et d’un bon pouvoir discriminant pour la détection du glaucome, comparable à celui de l’OCT et de l’HRT (3). Il permet ainsi la détection d’atteintes prépérimétriques. Surtout, la carte d’épaisseur permet de corréler l’atteinte des fibres avec les déficits périmétriques : la corrélation avec les déficits périmétriques localisés est bonne pour les faisceaux arciformes, mais mauvaise pour le faisceau papillo-maculaire (4). Il permet un suivi des altérations par une cartographie des modifications d’épaisseur ; une étude longitudinale est en cours pour établir la validité de ce suivi.
Le GDx ne peut se substituer aux autres examens (5) et doit s’intégrer aux données cliniques. Sa cible de détection, les fibres visuelles, en fait un complément important des autres examens fonctionnels (champ visuel) et structurels (imagerie de la papille, HRT) pour détecter et suivre un glaucome.
* Service du Dr Georges Caputo, fondation ophtalmologique Adolphe-de-Rothschild, Paris.
(1) Reus NJ, Lemij HG. Diagnostic Accuracy of the GDx VCC for Glaucoma. « Ophthalmology » 2004 ; 111 : 1860-1865.
(2) Blumenthal EZ, Frenkel S. Inter-device Reproducibility of the Scanning Laser Polarimeter With Variable Cornea Compensation. « Eye » 2005 Mar ; 19(3) : 308-311.
(3) Medeiros FA, et al. Comparison of the GDx VCC Scanning Laser Polarimeter, HRT II Confocal Scanning Laser Ophthalmoscope, and Stratus OCT Optical Coherence Tomograph for the Detection of Glaucoma. « Arch Ophthalmol » 2004 Jun ; 122(6) : 827-837.
(4) Horn FK, et al. Association Between Localized Visual Field losses and Thickness Deviation of the Nerve Fiber Layer in Glaucoma. « J Glaucoma » 2005 ;14(6) : 419-425.
(5) Kwartz AJ, et al. The Effectiveness of the Heidelberg Retina Tomograph and Laser Diagnostic Glaucoma Scanning System (GDx) in Detecting and Monitoring Glaucoma. « Health Technol Assess » 2005 ; 9(46) : 1-148.
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