LA COUR D’APPEL d’Amiens (Somme) a rendu le 14 février un jugement par lequel elle reconnaît l’adoption simple d’un garçon de 2 ans et demi par la compagne de sa mère biologique ; elle confirme une décision de première instance.
Dans deux autres affaires récentes, les jugements allaient dans le même sens : le 30 novembre 2006, le tribunal de Belfort prononçait l’adoption d’un enfant de 5 ans par un couple de lesbiennes et, en juin 2001, à Paris, l’adoption de trois petites filles par la conjointe de leur mère biologique avait été acceptée. Avec la décision d’Amiens, l’homoparentalité fait un petit pas dans le pré carré de la famille légale. Mais le droit à la parentalité pour les homosexuels, qui continue à diviser la France, n’est pas inscrit dans la loi et les magistrats n’apportent pas tous les mêmes réponses. La cour d’appel de Riom (Puy-de-Dôme), en juin 2006, a refusé l’adoption d’un enfant de 2 ans, élevé conjointement depuis sa naissance par deux femmes pacsées.
L’autorité parentale sans la filiation.
Michèle Tabarot, présidente du Conseil supérieur de l’adoption, par ailleurs députée des Alpes-Maritimes et déléguée générale de l’UMP à la famille, estime que la cour d’appel d’Amiens «détourne l’esprit de la loi, l’adoption ne devant pas être utilisée» pour faire reconnaître le droit des homosexuels à la parentalité. La mère concernée a dû renoncer en effet à sa propre autorité parentale afin que son amie puisse ouvrir une procédure de demande d’adoption simple.
Cette dernière, contrairement à l’adoption plénière qui rompt tout lien avec le parent biologique, ne change pas l’état-civil du jeune, mais lui donne les mêmes droits successoraux que l’enfant légitime. La mère biologique est donc contrainte de solliciter une délégation de partage de l’autorité parentale, de manière à retrouver ses droits sur son propre enfant. Cette délégation, les couples homosexuels peuvent la demander, à défaut d’adoption. La Cour de cassation l’a accordée, le 24 février 2006, à deux femmes vivant en couple, ce qui constituait une première.
Quoi qu’il en soit, si l’autorité parentale confère des droits, elle n’inscrit pas l’enfant dans la filiation. Cela ne permet pas de le «sécuriser», en cas de décès du parent biologique, souligne le mouvement associatif. «Quand le législateur français prendra-t-il en compte les demandes des familles homoparentales, quand cesseront les bricolages?», interpelle l’Association des parents et futurs parents gays et lesbiens.
Dans la classe politique, les opinions sont également partagées sur la question. Ségolène Royal est favorable à une réforme des liens entre homosexuels et à leur droit à l’adoption. La majorité actuelle a pris position en faveur d’un « contrat d’union civile », écartant l’adoption. «Que ce soit lors de l’examen de la loi sur l’adoption du 4juillet 2005 ou dans les conclusions de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur la famille, la représentation nationale n’a pas voulu reconnaître l’homoparentalité», rappelle Michèle Tabarot. Pour la défenseure des enfants, Dominique Versini, «la famille homosexuelle est une réalité».
En attendant une intervention du législateur, elle propose de simplifier et de rendre plus performante la délégation parentale. Dans ce climat, l’UMP souhaite un «grand débat national». «Les magistrats n’ont pas à en priver les Français», insiste Michèle Tabarot.
En France, on estime entre 30 000 et 40 000, le nombre d’enfants vivant auprès d’un couple homoparental.
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