UNE EQUIPE de chercheurs français de l'Institut Pasteur associés à une unité de l'Inserm (E352) vient de montrer le haut niveau d'efficacité d'un vaccin thérapeutique contre le papillomavirus humain de type 16. Faut-il rappeler que les HPV oncogènes sont responsables de l'immense majorité des cancers du col ? Le type 16 est, à lui seul, impliqué dans 55 % de ces lésions. Pour l'instant, le succès n'a été constaté que chez l'animal. Rapporté dans la revue « Cancer Research », il pourrait conduire à la mise en place d'essais cliniques dès le début 2006.
Le vaccin thérapeutique, une forme d'immunothérapie, a été mis au point et testé par l'équipe de Claude Leclerc (unité de biologie des régulations immunitaires de l'Institut Pasteur, Inserm E352), en collaboration avec la société BT Pharma (une start-up de l'Institut Pasteur) et l'unité de biochimie des interactions moléculaires dirigée par Daniel Ladant (Institut Pasteur-Cnrs). Il s'agit d'induire une réponse immunitaire contre un antigène tumoral porté par les cellules cancéreuses. Cette réponse se traduit notamment par la production de cellules tueuses orientées spécifiquement vers les cellules tumorales.
Protéine CyaA de Bordetella pertussis.
La préparation vaccinale repose sur la protéine CyaA de Bordetella pertussis. Les chercheurs y ont couplé génétiquement des fragments de la protéine oncogène E7 du papillomavirus de type 16. E7 constitue une cible privilégiée pour une vaccination thérapeutique, puisqu'elle représente un antigène tumoral exprimé par les cellules cancéreuses cervicales.
Le vaccin a été administré à des souris porteuses de tumeurs, modèles du cancer cervical humain. Après une seule injection, sans ajouter d'adjuvant, la préparation a entraîné une régression de la tumeur chez la totalité des animaux de laboratoire. Les chercheurs attribuent, en partie, cette activité au vecteur vaccinal. Il cible les cellules dendritiques, considérées comme les plus performantes dans la présentation de l'antigène vaccinal au système immunitaire. Il s'agit d'une supériorité de ce vaccin par rapport à ceux actuellement en cours d'essai dans le monde.
Associer HPV 16 et 18.
Alors que l'HPV de type 16 est responsable de la majorité des cancers cervicaux, celui de type 18 est impliqué dans 12 % de ces tumeurs. Les équipes françaises ont mis au point une préparation vaccinale similaire contre ce virus et ont obtenu des résultats comparables, qu'ils n'ont pas publiés. L'essai clinique qui devrait débuter l'an prochain associera les deux vaccins. Mis en place par BT Pharma, il pourrait offrir une possibilité thérapeutique contre 77 % des cancers cervicaux.
Les essais de vaccins préventifs sont plus avancés. « le Quotidien » rappelait, dans son édition du 5 janvier, l'efficacité d'un vaccin bivalent HPV 16 et 18 testé aux Etats-Unis auprès de plus de 1 100 femmes de 15 à 25 ans. Chez les volontaires ayant subi le protocole complet aucune infection persistante n'a été rapportée en deux ans et demi, une prévention contre une infection incidente a été obtenue chez 91,6 % des femmes. De même, au congrès Eurogyn, en novembre dernier, était annoncée la possible commercialisation de vaccins préventifs pour 2006. Deux préparations étaient évoquées l'une bivalente (HPV 16 et 18, l'autre tétravalante (HPV 6, 11, 16 et 18). Elles semblent très efficaces et fortement immunogènes.
Ces vaccins préventifs soulèvent des questions spécifiques, que rappellent les chercheurs français. Ils ne devraient pas permettre d'éviter les quelque cinq millions de décès attendus dans le monde au cours des vingt prochaines années. Les autres questions sans réponses portent sur la mise en place d'un programme d'immunisation des adolescentes avant le début de leur vie sexuelle, de la vaccination ou non des garçons et aussi du risque d'émergence de souches d'HPV oncogènes pour l'instant discrètes.
Xavier Préville, Daniel Ladant, Benedikt Timmerman, Claude Leclerc, « Cancer Research », 15 janvier 2005.
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