Testé chez des volontaires contre le virus H5N1

Un vaccin serait actif à hautes doses

Publié le 29/03/2006
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RIEN qu’aux États-Unis, trente programmes de recherche sur la vaccination contre le virus H5N1 sont en cours. Le travail du Dr John Treanor (Rochester) est l’un des premiers financés par le National Institute of Allergy and Infectious Diseases a être publié depuis la mise en oeuvre des mesures d’incitation à la recherche d’un vaccin contre le virus de la grippe aviaire. Dans un éditorial, le Dr Gregory Polland (Rochester) déclare que «cette étude multicentrique randomisée et en double aveugle contre placebo utilisant un sous-virion est à la fois importante et informative. »

Les investigateurs ont enrôlé dans l’étude 451 adultes sains, âgés de 18 à 64 ans, qui ont tous reçu deux doses d’un vaccin contenant 90, 45, 15 ou 7,5 µg d’antigène hémagglutinique ou un placebo. Le vaccin a été produit à partir d’un virus H5N1 de clade 1 isolé chez l’homme (A/Vietnam/1203/2004) et grâce à un procédé de sauvetage de plasmide qui concourt à ne faire exprimer que les gènes de l’hémagglutinine et de la neuraminidase. Les autres gènes du virus recréé étaient dérivés d’une souche grippale avirulente adaptée à l’oeuf (A/PR/8/34). Le gène de l’hémagglutinine a ensuite subi une autre modification : les six acides aminés habituellement associés au potentiel de pathogénicité élevée et qui se situent au niveau du site de clivage entre l’hémagglutinine 1 et l’hémagglutinine 2 ont été remplacés par d’autres acides aminés.

Pour évaluer le potentiel immunogène de ce vaccin, l’équipe du Dr Treanor a procédé à des tests de microneutralisation et d’inhibition de l’hémagglutination en utilisant le virus vaccinal ainsi que le H5N1 sauvage utilisé pour la mise au point du vaccin.

Immunogénicité faible à modérée.

«Le vaccin testé a été bien toléré, mais son immunogénicité s’est révélée faible à modérée», analyse l’éditorialiste. Dans un seul groupe de sujets, en effet, plus de la moitié des personnes ont atteint le seuil d’immunogénicité fixé par les investigateurs (titrage des anticorps supérieur à 1:40). Il s’agissait du groupe vacciné par deux doses contenant 90 µg d’antigène administrées à 28 jours d’intervalle (43 % de personnes ont atteint le seuil neutralisant dans le groupe 45 µg, 22 % dans le groupe 15 µg et 9 % dans le groupe 7,5 ug). «Cette dose est douze fois supérieure à celle utilisée habituellement pour la vaccination grippale saisonnière. Or les capacités de production annuelle de vaccin sont actuellement de 900millions de doses avec un titrage d’antigènes de 15µg et si la dose nécessaire pour vacciner les populations contre le virus H5N1 reste de 90µg, seulement 75millions d’habitants de la planète pourraient bénéficier d’une telle vaccination », analyse l’éditorialiste. Dans ces conditions, de nouveaux essais vaccinaux dérivés de celui du Dr Treanor sont nécessaires afin de tester l’utilité de l’adjonction d’adjuvant (hydroxyde d’aluminium ou MF59) à ces préparations, afin de réduire les doses antigéniques nécessaires.

Titre d’anticorps inférieur à 1:40.

«Par ailleurs, le choix du titrage des anticorps suffisant pour protéger contre l’infection par le virus H5N1 n’est pas fondé sur les preuves irréfutables. On sait, en effet, que certaines personnes porteuses dont le titre d’anticorps est inférieur à 1:40 sont protégées contre l’infection, alors qu’à l’inverse une véritable symptomatologie peut se développer même en présence d’un titre d’anticorps élevé », continue le Dr Poland. La question se pose d’autant plus que la population sera tout à fait naïve face au virus H5N1 si la pandémie survient. Par ailleurs, le degré de protection sera peut être aussi influencé par des facteurs tels que l’âge ou l’état clinique sous-jacent. Enfin, l’éditorialiste ajoute que «ce candidat vaccin a été mis au point avec une souche H5N1 clade1, mais que des virus de clade2 surviennent actuellement et qu’ils peuvent eux aussi être mortels (voir encadré) . Le niveau d’immunisation croisée entre les différentes clades doit être évalué et il n’est pas impossible qu’un autre vaccin soit nécessaire pour les virus de clade2».

« New England Journal of Medicine », vol. 354 ; 13, pp. 1 343-1 351, 1 411-1 413 et 1 421-1 422, 30 mars 2006.

H5N1 clade 2 en Chine

Alors que, jusqu’à présent, on considérait que les virus H5N1 de clade 2 n’étaient présents chez l’homme qu’en Indonésie, une lettre publiée dans le « New England Journal of Medicine » tendrait à prouver que ce virus sévit aussi en Chine. Le Dr Yuelon Su (Pékin) décrit le cas d’une femme enceinte de 4 mois qui a été hospitalisée pour une grippe aviaire dans les suites de contacts rapprochés avec des volailles mortes. L’analyse génotypique a permis de rapprocher le virus infectant de ceux détectés en Indonésie chez l’homme et l’animal.

> Dr ISABELLE CATALA

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7930