CONÇU COMME une arme ciblant de manière spécifique les mélanomes, un vaccin thérapeutique mis au point par une équipe de l'université de Pennsylvanie pourrait profiter à bien plus de patients que prévu.
Les premiers essais précliniques conduits chez la souris indiquent en effet que ce vaccin ne se contente pas d'induire une puissante réponse cellulaire dirigée contre les mélanomes. Il conduit visiblement aussi à une inhibition de la néoangiogenèse de divers types de tumeurs solides.
Yvonne Paterson et coll. ont développé une immunothérapie antitumorale se fondant sur le ciblage de « l'antigène de haut poids moléculaire associé au mélanome » (HMW-MAA). Ce peptide est surexprimé par les cellules des mélanomes, mais aussi par celles d'autres cancers tels que des carcinomes basaux, des tumeurs dérivant de la crête neurale, certaines formes de leucémies de l'enfant ou encore certains carcinomes mammaires. Le peptide est en outre produit dans les péricytes, ces cellules qui forment la tunique externe des capillaires artériels, veineux ou lymphatiques.
Une très forte réponse immunitaire.
L'équipe américaine a choisi une stratégie originale pour induire une réaction immunitaire contre cet antigène tumoral. Les chercheurs ont utilisé la bactérie Listeria monocytogenes. Concrètement, ils sont partis d'une souche non pathogène de la bactérie et l'ont génétiquement modifiée pour qu'elle exprime l'antigène HMW-MAA en fusion avec l'un de ses facteurs de virulence (la lystériolysine O). Compte tenu de la physiologie de cette bactérie, en particulier de sa capacité à infecter les cellules présentatrices d'antigènes telles que les macrophages et les cellules dendritiques, cette astuce permet d'obtenir une très forte réponse immunitaire. Les bactéries génétiquement modifiées vont non seulement conduire à une réponse immune innée, mais aussi stimuler la production de lymphocytes T (CD4 et CD8) dirigés contre HMW-MAA.
Ce vaccin thérapeutique a tout d'abord été testé chez des souris portant un mélanome d'origine humaine. Dans ce système, trois injections de bactéries ont suffit à inhiber de manière significative la croissance des mélanomes. Chez cinq des huit animaux traités, les chercheurs ont même pu constater une disparition complète des cellules tumorales. Mieux encore : si des cellules de mélanomes sont réinjectées aux animaux qui ont bien répondu au traitement vaccinal, elles sont immédiatement éliminées par le système immunitaire.
À leur grande surprise, les chercheurs ont, en outre, constaté que le vaccin permet de freiner la croissance d'autres types de tumeurs, en particulier celle de tumeurs mammaires qui n'exprime pas l'antigène HMW-MAA. Il semble que cette activité inattendue du vaccin passe par la capacité du vaccin à induire la destruction des péricytes du système vasculaire tumoral. Le vaccin aurait donc une activité antiangiogénique, potentiellement bénéfique pour le traitement d'innombrables cancers.
P. C. Maciag et coll., « Cancer Research », octobre 2008, vol. 68, pp. 8066.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature