L'ÉTUDE, publiée ce mardi dans le « BEH », permet une nouvelle fois de mettre l'accent sur la couverture vaccinale contre la grippe particulièrement basse chez les soignants et de souligner l'importance des précautions d'hygiène, dont le lavage des mains associé au port du masque. La transmission nosocomiale de la grippe existe, et pas seulement dans les services de long séjour où elle a déjà été mise en évidence, particulièrement lors d'épisodes épidémiques. L'étude prospective mise en place par le service épidémiologie, hygiène et prévention de l'hôpital Édouard-Herriot (HEH) et le laboratoire de virologie est des Hospices civils de Lyon montre que les services de court séjour sont également concernés. Pendant trois ans (2004-2007), tous les syndromes grippaux diagnostiqués à l'hôpital ont été recensés, afin d'estimer l'incidence de la grippe nosocomiale et de mesurer l'intensité de la transmission nosocomiale.
Patients et soignants.
Durant les trois saisons, 276 cas ont été inclus : 68 patients et 108 soignants. À l'exception de 3 patients, tous ceux qui présentaient un syndrome grippal ont accepté de participer à l'étude. L'analyse virologique a permis de confirmer le diagnostic de grippe chez 61 participants : 39 patients adultes et 22 soignants. Parmi eux, 34 % souffraient d'infections nosocomiales (21 personnes, dont 11 patients et 10 soignants). Les autres étaient identifiés comme des cas communautaires, leurs symptômes étant apparus moins de 72 heures après leur admission à l'hôpital (voir encadré). Les cas nosocomiaux sont soit des patients dont les symptômes sont apparus plus de 72 heures après l'hospitalisation, soit des soignants chez qui la notion de contact avec un individu grippé au sein de l'établissement a été retrouvée. Plus de 40 % des soignants inclus chez qui le diagnostic de grippe était confirmé ont présenté une infection nosocomiale.
Parmi les cas de grippe nosocomiale, 2 patients (91 et 85 ans) et 2 soignants (42 et 49 ans) étaient vaccinés.
Les investigateurs ont pu mettre en évidence 14 cas de transmission (épisodes de cas groupés) de patients à patients (36 %), de patients à soignants (43 %) et de soignants à soignants (21 %). Dans 6 cas (43 %), un individu vacciné, patient ou soignant, était à l'origine de la transmission. Les auteurs, le Pr Philippe Vanhems et ses collaborateurs, précisent toutefois qu'en 2004-2005, année où 9 cas de transmission ont été mis en évidence (1 en 2005-2006 et 4 l'année suivante), «aucun cas n'a été observé dans un service où 75% du personnel était vacciné. Au contraire, dans un autre service où 5% du personnel était vacciné, 4 cas de transmission ont été observés.»
Au cours de cette saison 2004-2005, marquée par une épidémie qualifiée de modérée, il existait une différence entre la souche circulante (de type A) et la souche vaccinale, «ce qui peut expliquer les transmissions ayant pour origine des individus vaccinés», indiquent-ils. Cette situation ne s'est pas reproduite les saisons suivantes, marquées par ailleurs par une épidémie de faible intensité. De plus, lors de l'épidémie de 2005-2006, la souche majoritaire était la souche B, qui pourrait être moins épidémiogène que la souche A. D'où le nombre très peu élevé de transmission (une seule).
Couverture vaccinale très faible.
Compte tenu de la configuration pavillonnaire de l'hôpital Herriot, les transmissions ont été «probablement limitées», font observer le Pr Vanhems et coll. Toutes ont eu lieu à l'intérieur d'un même service (pas de transmission entre services). Elles mettent en évidence, selon eux, «le rôle essentiel de la vaccination chez les professionnels de santé pour diminuer la diffusion du virus». Pourtant, précisent-ils, «malgré un retour des résultats chaque année auprès des services, la couverture vaccinale est restée faible, avec en moyenne 17 à 20% du personnel vacciné». Vaccination et mesures d'hygiène (lavage des mains, masque) sont essentiels pour éviter les conséquences parfois graves des infections grippales nosocomiales : une patiente de 49 ans, non vaccinée, avec des antécédents de cancer du sein avec métastases, est décédée durant son séjour à l'hôpital, un patient vacciné a présenté des complications cardiaques tandis qu'un soignant non vacciné a vu sa grippe se compliquer d'une angine.
La 72e heure
Selon la littérature, une grippe est considérée comme nosocomiale si elle apparaît 72 heures ou plus après l'admission. Dans leur étude, le Pr Philippe Vanhems et coll. s'interrogent. Cinq patients ont présenté une grippe confirmée après 24 ou 48 heures d'hospitalisation. Pour l'un d'entre eux, un cas secondaire apparu 24 heures après l'admission, il existait une source avérée dans le service. «La présence de ces cas pourraient nous amener à reconsidérer ce délai de 72heures comme critère de définition d'une grippe nosocomiale», déclarent-ils.
2007-2008, une épidémie peu sévère
Selon les données de surveillance de la grippe dans la communauté fournies par le réseau Sentinelles et le réseau des GROG (groupes régionaux d'observation de la grippe), la saison 2007-2008 a été caractérisée par une épidémie grippale modérée et peu sévère survenue entre mi-janvier et début mars 2008. Le pic épidémique est survenu début février (semaine 06/2008). Une première circulation majoritaire de virus grippaux A (H1N1) a été suivie d'une circulation plus tardive de virus de type B et d'une queue d'épidémie prolongée. De nombreux foyers d'infections respiratoires aiguës (IRA) ont été signalés en collectivités de personnes âgées, particulièrement dans la seconde phase de l'épidémie.
D'un point de vue virologique, le fait marquant de la saison est la mise en évidence d'une émergence et d'une forte prévalence de virus A (H1N1) naturellement résistants à l'oseltamivir (Tamiflu), en France comme en Europe. La France, avec 44 % de virus résistants sur l'ensemble des échantillons testés, se situe au 3e rang derrière la Norvège (67 %) et la Belgique. En Italie, la prévalence est de 1 %.
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