UNE FEMME sur cinq et un homme sur dix souffrent de fuites urinaires. A l'âge de 5 ans, 15 % des enfants font encore pipi au lit. Le trouble se produit à tout moment de la vie, mais est vécu dans la honte, chez les adultes particulièrement. Or l'incontinence doit être prise en charge dès qu'elle apparaît car elle ne régresse jamais seule. Pour sensibiliser le public à ce problème, l'Association française d'urologie (AFU) lance, du 2 au 6 avril, la 5e édition de la Semaine nationale de l'incontinence.
Une campagne d'affichage dans les cabinets médicaux, avec ce slogan : «Ça paraît simple et pourtant…», est le point fort de cette manifestation. Il s'agit d'encourager les patients à parler de leurs problèmes de miction, à lever les tabous afin que leur qualité de vie puisse être améliorée.
Autre moment clé : les 5 et 6 avril, de 9 heures à 19 heures, de jeunes urologues répondront au téléphone aux questions du public. Le Numéro Indigo 0.820.202.502 (0,09 euro la minute), mis en place par l'AFU, permettra à chacun de s'exprimer librement car l'appel est anonyme.
Les fuites urinaires ne devraient plus être considérées comme une fatalité, un phénomène bénin avec lequel, certes dans la gêne, «on fait avec». Car elles révèlent parfois des pathologies sous-jacentes : cystite, prolapsus chez la femme, hypertrophie de la prostate chez l'homme et, pour les deux sexes, atteinte neurologique, début d'un Parkinson ou d'une sclérose en plaques.
Un bilan urodynamique nécessaire.
Les urologues insistent sur la nécessité d'un bilan urodynamique en cas d'incontinence urinaire complexe. Cet examen permet de connaître des paramètres physiques essentiels : enregistrement du débit urinaire durant la miction, de la capacité vésicale, des variations de la pression dans la vessie et dans l'urètre… Ce bilan s'adresse aux femmes avant un traitement chirurgical, en cas de dysurie ou lors d'une exploration d'une pollakiurie qui serait liée à une hyperactivité vésicale. Pour les hommes, il est utile, en cas de dysurie complexe associée à un trouble prostatique, ou, au contraire, à une incontinence sévère après chirurgie prostatique. L'urodynamique permet d'identifier les facteurs responsables de l'incontinence et de prédire les complications éventuelles des traitements. «Mais il s'agit d'un examen long (une heure) , qui exige un équipement lourd, la présence d'une infirmière et l'usage de beaucoup de consommables. Donc un examen coûteux, souligne le Dr Jean François Hermieu, de l'AFU. Or, la nomenclature ne tenant pas compte du prix des consommables, il n'est plus rentable et risque de disparaître de l'exercice libéral.»
Progrès des traitements.
En revanche, les traitements progressent. Ils font souvent appel à des dispositifs conçus en polymères biocompatibles pour lesquels l'AFU demande des normes. Les ballons ajustables (ACT, Adjustable Continence Therapy), implantés sous anesthésie locale, compriment l'urètre selon les besoins des patients. Les sphincters urinaires artificiels s'adressent aux cas lourds : femmes victimes de graves incontinences à l'effort, hommes très incontinents après chirurgie de la prostate et, sans distinction de sexe, lorsque l'incontinence est d'origine neurologique. Les bandelettes sous-urétrales de type TVT (Tension-free Vaginal Tape), qui existent en France depuis dix ans, constituent un support de l'urètre, empêchant les fuites urinaires au cours d'une activité physique. La version TOT (Trans Obturator Tape) se place grâce à une incision vaginale.
Les deux dispositifs affichent des résultats remarquables : 90 % de guérison. La technique de neuromodulation des racines sacrées (faibles impulsions électriques du système nerveux contrôlant le fonctionnement de la vessie, de l'anus et du rectum) bénéficie aux cas très sévères. Le dispositif s'implante en sous-cutanée en haut de la fesse.
Les traitements médicamenteux devraient, eux aussi, connaître un bouleversement avec le développement de la toxine botulique. Elle est déjà utilisée avec succès dans les incontinences neurologiques (lésions de la moelle et sclérose en plaques) provoquant une contraction involontaire et réflexe de la vessie. Les injections, une fois par an, se pratiquent à l'hôpital, la demande d'AMM et de remboursement se fera dans un ou deux ans et son application devrait s'élargir. Ainsi, du cas le plus lourd au plus bénin, il existe des traitements contre l'incontinence. En parler ne devrait plus être tabou.
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