PRATIQUEMENT TOUS les enfants sont porteurs de Streptococcus pneumonia à un moment ou à un autre de l'année. Ce portage pharyngé risque de se compliquer d'autant plus facilement que l'enfant présente une infection virale concomitante. Si les infections dues au pneumocoque sont le plus souvent bénignes, ce germe représente la première cause de bactériémie chez les nourrissons de moins de 2 ans. Dans un certain nombre de cas, il va passer dans le liquide céphalo-rachidien, pratiquement toujours par le biais des plexus choroïdes, et entraîner une méningite. Depuis la généralisation du vaccin anti-Haemophilus de type B, le pneumocoque est devenu le premier agent des méningites chez les moins de 2 ans. « La prévention de la majorité des infections invasives à pneumocoque est possible depuis la mise à disposition d'un vaccin pneumococcique conjugué (Prevenar) hautement immunogène chez l'enfant dès l'âge de 2 mois », rappelle le Dr Robert Cohen (CHI, Créteil).
En réanimation.
Les observations suivantes témoignent de l'importance de cette vaccination. Lou, âgée de 6 mois, a eu une histoire initiale stéréotypée d'otite et de fièvre, avec antibiothérapie, raconte le Dr Isabelle Desguerre (hôpital Necker - Enfants-Malades, Paris). A 48 heures, la fillette est hospitalisée en réanimation pour un état de mal convulsif qui a duré 40 minutes. Elle en sort avec un déficit moteur, se réveille après 5 jours, mais garde un EEG asymétrique. Alors qu'un scanner initial avait été étiqueté comme étant dans la limite de la normale, l'IRM cérébrale pratiquée à distance - 6 semaines - met en évidence une atrophie cortico-sous-corticale importante. A 3 ans et demi, elle présente un retard de langage massif (elle ne dit que deux mots), une épilepsie partielle lésionnelle et une hémiparésie droite. Cet autre nourrisson est hospitalisé pour des troubles de la conscience, une crise partielle prolongée, un état de mal de plus de 30 minutes, avec une récupération rapide, en moins de 72 heures. Lors de la sortie du service de réanimation, son EEG est asymétrique et il a une hémiparésie droite. L'IRM montre une atrophie et, comme précédemment, le scanner initial était normal. A 3 ans, il a un léger déficit moteur suivi en psychomotricité. Encore plus graves sont les cas de deux enfants de 14 et 12 ans qui ont présenté un œdème cérébral et un engagement, et sont décédés en 6 heures. L'arrêt de la réanimation a été décidé devant les lésions cérébrales massives. Les seuls éléments qui avaient été notés chez ces grands enfants étaient une forte fièvre depuis 48 heures, des céphalées et des troubles du comportement, « qui auraient dû faire tiquer », souligne le Dr Desguerre.
A cinq ans.
Les séquelles à 5 ans des méningites ont été étudiées par une équipe britannique sur une cohorte d'enfants qui ont survécu à une infection de ce type contractée au cours de leur première année de vie (1). Globalement, à l'âge de 5 ans, 15,2 % des enfants présentaient des séquelles, ce qui correspond à un risque dix fois plus élevé que dans le groupe contrôle. Les auteurs ont observé des différences importantes de la sévérité de ces séquelles selon les germes en cause. Après les méningites à pneumocoque, des séquelles ont été constatées chez presque la moitié des enfants (49,7 %). Celles-ci étaient sévères ou modérées dans, respectivement, 9,7 % et 13,9 % des cas.
En ce qui concerne les épilepsies lésionnelles, leur incidence varie de 4,2 à 8 %, selon les études. Seul un suivi à long terme permet d'évaluer précisément les conséquences de ces méningites. Faute de quoi, elles peuvent être méconnues, ce qui est préjudiciable, car elles sont très souvent associées à des séquelles motrices et, du fait des difficultés d'un contrôle thérapeutique satisfaisant, vont majorer les déficits d'apprentissage. En ce qui concerne le retard mental, les chiffres disponibles sont également disparates, de 5,1 à 19 %. D'une manière générale, les difficultés d'apprentissage scolaire chez ces enfants sont sous-estimées. Elles prédominent dans le domaine verbal et sont corrélées aux complications neurologiques.
Journées d'Amphis du Medec « Lutte contre les méningites bactériennes de l'enfant : où en est-on ? » parrainée par le laboratoire Wyeth.
(1) Bedford H, de Louvois J, Halket S, Peckham C, Hurley R, Harvey D. Meningitis in Infancy in England and Wales: Follow up at Age 5 Years. « BMJ », 2001 ; 323(7312) : 533-6.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature