Quatre grands facteurs de risque curables par traitement médicamenteux ou vitaminique (hypercholestérolémie à LDL, hypertension artérielle, majoration de l'homocystéinémie et troubles de l'agrégation plaquettaire) peuvent conduire à l'apparition de maladies cardio-vasculaires. Or, ces affections sont à l'origine du plus grand nombre des décès chez les sujets vivants dans les pays industrialisés. L'idée du Dr N. Wald (Londres) est simple : il s'agit de travailler à la mise au point d'une « polypilule » regroupant des traitements contre les quatre grands facteurs de risque, afin de diminuer la mortalité d'origine cardio-vasculaire chez les plus de 55 ans. Pour cela, il a colligé les 400 études d'intervention primaire (chez les sujets sains) et secondaires (dans les suites d'un premier incident cardio-vasculaire) de la littérature.
« Il est possible de diminuer de plus de 80 % la mortalité cardio-vasculaire chez les plus de 55 ans par l'administration quotidienne d'une "polypilule" contenant six principes actifs : une statine (atorvastatine ou simvastatine), trois antihypertenseurs de classes différentes prescrits à demi-doses (thiazidique, bêtabloquant et IEC), de l'acide folique (0,8 mg) et de l'aspirine (75 mg) », explique le Dr Wald. L'analyse des bénéfices cumulés sur l'incidence des cardiopathies ischémiques incite les auteurs à conclure que ce risque serait diminué de 88 % et que celui des accidents vasculaires cérébraux serait minoré de 80 %.
Gain espéré de onze années de vie
Si l'on extrapole ces bénéfices calculés à la population générale des plus de 55 ans, on peut avancer qu'un tiers de cette population traitée par une polypilule quotidienne bénéficierait substantiellement du traitement (gain moyen de onze années de vie).
La question des effets secondaire d'un tel traitement s'est aussi posée. L'analyse de cette donnée dans quinze essais cliniques d'intervention permet au Dr Walsh de conclure que, « si le traitement comporte un thiazidique, un AAII et un inhibiteur calcique, le taux d'effets secondaires sera de 8 % dans la population traitée, et si les antihypertenseurs choisis sont un thiazidique, un bêtabloquant et un IEC, ce taux passera à 15 % ». La plupart de ces effets indésirables seraient attribuables à l'utilisation d'aspirine.
Priorité à la lutte contre les facteurs de risque
Pour le Dr Anthony Rodgers, éditorialiste, « cette stratégie de prévention médicamenteuse ne doit pas faire perdre de vue que la première prise en charge des maladies cardio-vasculaires passe par la lutte contre certains facteurs de risques tels que le tabagisme, l'obésité, la mauvaise alimentation conduisant à l'hypercholestérolémie et à l'hypertension ». En outre, il précise que « des études pharmacocinétiques à long terme doivent être mises en route afin de confirmer l'impact thérapeutique à long terme de telles associations ». Enfin, la question du rapport coût/bénéfice d'une telle stratégie de prévention doit se poser à l'échelle de la population. Le choix des traitements antihypertenseurs les moins onéreux et le recours à des génériques pourrait permettre de limiter le coût et de le rendre acceptable pour les décideurs de santé.
« BMJ », 28 juin 2003, vol. 326, pp. 1408-1409 et 1419-1423.
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